La rédaction Chloé Brendlé
Articles
Croire au noir
Deux ans après Ceux du noir, Marielle Hubert persiste en signant un deuxième récit âpre et perturbant sur sa mère et l’enfance incurable de celle-ci, Il ne faut rien dire.
Drôle d’adresse au lecteur à l’orée d’un livre que celle-ci : Il ne faut rien dire ! Plusieurs voix se battent dans ce titre, celle de la menace, celle de la peur, celle du défi aussi. C’est en tout cas, à l’heure d’après #MeToo, une injonction qui semble aller à contre-courant des témoignages qui se sont multipliés dans la presse (à propos de Matzneff, PPDA, Depardieu, tant d’autres) et dans les librairies (entre autres La Familia grande, de Camille Kouchner, Le Consentement, de Vanessa Springora et tout récemment, Notre silence nous a laissées seules, de l’actrice Judith Chemla). De...
Le retour de Roman
À l’occasion du centenaire de Romain Gary, a ressurgi des limbes un détonnant inédit de jeunesse.
Un macchabée tout nu appelait sa mère, un vieillard miteux pleurnichait, un monsieur décoré hurlait qu’il allait mourir, sans préciser ce qu’il entendait par là et un chapeau melon complètement affolé roulait par terre, poursuivi par trois petits ratons joyeux. » : bienvenue dans le cimetière de revenants où s’est égaré Tulipe, le héros, et où nous entraîne Roman Kacew. Il faut bien avouer...
Vies Arides de Graciliano Ramos
Alors que réapparaissent sur nos écrans les images troublantes de São Bernardo, adaptation cinématographique du roman éponyme de Graciliano Ramos, les éditions Chandeigne proposent une nouvelle traduction du recueil de nouvelles de ce grand auteur brésilien, Vidas secas. Là où São Bernardo épouse le destin d’un paysan devenu par obstination et aveuglement propriétaire d’une fazienda, Vies...
Cause commune
« La vie. La vraie. Auchan. » Le temps d’une année et d’un bref journal de bord, Annie Ernaux nous entraîne au cœur du centre commercial de Cergy les Trois-Fontaines, son hypermarché Auchan. L’occasion de nous interroger sur l’aboutissement d’une œuvre littéraire et l’inscription de celle-ci dans un chantier collectif et sociologique, « Raconter la vie ».
Les gens ne se parlaient pas, ils regardaient devant eux, cherchant à évaluer la vitesse de progression. Il faisait très chaud. M’est venue la seule question que je me pose des quantités de fois, la seule qui vaille : pourquoi on ne se révolte pas ? ». Les désirs qui surgissent à l’hypermarché et sous la plume d’Annie Ernaux sont de toutes sortes : de résistance mais d’annihilation, de...
Poésie du gérondif de Jean-Pierre Minaudier
Une mouche tsé-tsé l’a piqué. En tariana (une des langues d’Amazonie), il suffit d’ajouter au verbe un petit suffixe, dit « évidentiel » (dans le jargon des linguistes et des grammairiens cette fois), pour préciser si l’on a vu la mouche foncer sur sa victime, si l’on a entendu les cris de douleurs de celle-ci, si on l’a déduit à la taille de la blessure ou si on a appris le forfait par...