De Nantes, via L’Atalante, une maison d’édition particulièrement innovante dans le domaine du polar, nous viennent souvent de bonnes surprises. Joseph K., autre éditeur nantais qui n’affiche a priori aucune spécialisation policière, publie aujourd’hui le premier volet d’une importante et très intéressante étude de Robert Giraud et de Pierre Ditalia, L’Argot de la série noire consacré à l’argot des traducteurs. Un second volet portera plus précisément sur l’argot des auteurs français.
Il ne s’agit pas ici de s’indigner en puristes sur l’effet de mode par lequel la traduction des titres des romans de Chandler pouvait transformer The Little Sister en Fais pas ta rosière, The Long Goodbye en Sur un air de navaja et Playback en Charade pour écroulés. Le parti pris des auteurs est de montrer comment la traduction du roman policier américain (mais n’est-ce pas vrai de toute traduction ?) n’est pas selon la classique et trop simpliste homophonie, une trahison mais le lieu d’un véritable travail de création linguistique. Exemple : la traduction en 1962 de Y a qu’à se baisser de Lawrence Block par Jean Rosenthal. « La bataille était gagnée d’avance mais j’étais vachement décidé à jouer jusqu’au bout. Ma main experte lui arracha un petit gémissement qui n’était pas feint. Elle ardait comme un coup de soleil ». L’invention du verbe « arder » qui ne doit rien à l’argot américain (le slang) mais renoue avec le feu de l’ardor latin est la création poétique de l’un de ces traducteurs inspirés auxquels cette étude rend enfin justice. Signalons aussi que Joseph K. publie en même temps une remise à jour du dictionnaire de Claude Mespede et Jean-Jacques Schleret, Les Auteurs de la série noire qui était sorti en son temps chez Futuropolis (630 pages, 185 FF).
L’Argot de la série noire, T I
Robert Giraud -Pierre Ditalia
Joseph K.
70, rue du maréchal Joffre 44 000 Nantes
380 pages, 160 FF
Domaine français Ce que jacter veut dire
mars 1997 | Le Matricule des Anges n°19
| par
Christophe David
Un livre
Ce que jacter veut dire
Par
Christophe David
Le Matricule des Anges n°19
, mars 1997.