Les éditions Climats reçoivent en moyenne trois manuscrits par jour. Chacun est enregistré et un accusé de réception est envoyé : « on prévient l’auteur qu’un délai de trois mois est nécessaire, mais je ne tiens plus la distance, je vais devoir changer cela. J’essaie de regarder ce qui arrive un peu tous les jours, mais je n’y arrive pas. Alors tous les 15 jours, trois semaines, je prends une journée où je ne fais que ça. Il y a un tri qui s’opère assez rapidement. Au bout de trente pages, je sais si ça m’intéresse ou pas. Pour les ouvrages qui ne sont pas du tout pour notre maison d’édition, deux pages suffisent. » Admettons qu’une première lecture provoque immédiatement un attachement pur le texte : « Là se pose la question d’une deuxième lecture : est-ce que je ne me suis pas trop vite emballé. En ce moment, par exemple, j’ai un manuscrit que j’ai trouvé bon, mais je ne pense pas le prendre parce qu’il manque un petit quelque chose. Il y a des hésitations qui peuvent durer très longtemps, c’est infernal. Quand le doute ne m’effleure plus et que je décide d’y aller, je me retrouve dans deux situations possibles : soit tout est parfait, soit il y a des choses à resserrer, à revoir. dans ce cas je demande une deuxième version sans promettre de publication. » Si 95% des manuscrits sont des romans, Alain Martin élimine d’office tout ce qui revêt un caractère historique, car cela ne l’intéresse guère. Il avoue aussi penser aux relais qu’un livre peut nécessiter pour être vendu, à ce qu’un titre peut toucher comme catégorie de lecteurs. Mais il ajoute : C« ’est très hypothétique. Par exemple pour le Semprun que j’ai publié, j’étais sûr d’avoir la presse. Or, rien du tout. » Reste que presse ou pas, Alain Martin poursuit son travail de découvreur : sur les cent soixante titres de son catalogue, une trentaine a transité d’abord par La Poste. Il y a de l’espoir.