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Premiers romans L’exil automnal

mai 1999 | Le Matricule des Anges n°26 | par Philippe Savary

Comment s’arranger avec la vie quand on est déraciné et que la mauvaise saison s’installe. Roger Wallet signe une chronique belle et délicate.

Portraits d’automne

Ce livre, aussi mince qu’une lueur, est une aubaine en ces temps d’agitation. Un charme discret, une force vive mêlée de tendresse et de désenchantement parcourent avec retenue cette centaine de pages. Ici, pourtant, rien de très ambitieux, sinon le simple désir de raconter une histoire, qui pourrait être la nôtre, en en suivant les délicats méandres, en s’abreuvant à la source chaude du souvenir. Portraits d’automne est le livre d’un destin, minuscule, ordinaire, de celui qui, arraché à ses racines, bascule dans un monde de transit. Originaire de Carcassonne, Marc Jimenez est un jeune instituteur dont le mauvais sort le conduit pour sa première affectation dans un petit bourg près de Beauvais. Nous sommes au début des années 60, l’air du temps est légèrement vicié ; comme beaucoup d’autres de sa génération Jimenez se retrouve jeté là « sans vraiment l’avoir souhaité, un peu par obligation, un peu parce que « Quoi faire d’autre ? La banque ? » ». Quitter ses dix-huit ans, ses coteaux, ses oliviers, un père ex-combattant de la République espagnole, pour rejoindre là-haut l’odeur entêtante des betteraves, le choc est rude, à deux doigt de la désertion ou du suicide. Il faut pourtant s’y faire. Est-ce le paysage détrempé de la Picardie, « pays de pissats », qui déforme tant les visages et « ravine le cœur » ? Est-ce plutôt l’exil qui rend cette terre si absente ? Il faut pourtant s’accommoder de ces horizons moites et angoissants aux allures de steppes, ces écoliers silencieux et laborieux, ces hommes dont « j’entendais battre leur vie sans échappée, sans voyage », ce « parler (…) très nasal, jeté sur la table comme une fatigue ». Jimenez s’enfonce dans la grisaille et le gel des jours sans fin. Seul, menacé par une existence « d’habitudes et de méthodes », le jeune instituteur s’abrite comme il peut pour se réchauffer le cœur : les demoiselles de son âge que l’on rencontre devant Jules et Jim, la photographie qui maintient l’œil en éveil et laisse les traces de sa chère Occitanie, des moments perdus au Bar des deux rives, mais surtout la belle Hélène Bogaert, une troublante parent d’élève à l’histoire que l’on devine compliquée. Que fait-elle là ? Une autre solitude ? La lecture de Supervielle ou de quelques poèmes de René-Guy Cadou aidant, il en tombera éperdument amoureux.
Dans Portraits d’automne, tout est en demi-teinte. La mauvaise saison s’étire, laissant ses pensionnaires fourbus devant le manque de perspectives. Roger Wallet jauge le monde à ras d’homme : attentif aux choses, respectueux des êtres, il nous offre une chronique pleine de délicatesse qui donne à la nostalgie une éternelle jouvence. Sous ce ciel bas, cette atmosphère lourde et poisseuse, sous cette « monotonie fuligineuse » qui suintent, palpite le cœur de la vie. Les bruissements de l’âme, les frisonnements du corps sont rendus avec une extrême retenue, comme s’il s’agissait de respecter un fragile et mystérieux équilibre. Avec pudeur, avec patience, sans pathos, le regard clair et acéré, Roger Wallet parvient finalement à percer l’humide gangue d’un terroir hostile, avec pour seul recours, le bonheur des mots simples. Un travail de recomposition, proche de celui des peintres, vif comme un fugitif ravissement.

Portraits d’automne
Roger Wallet

Le Dilettante
126 pages, 85 FF

L’exil automnal Par Philippe Savary
Le Matricule des Anges n°26 , mai 1999.
LMDA PDF n°26
4,00