Réédition d’un texte paru chez Calligrammes en 1984, cette Cale ronde ouvre au lecteur l’espace salin et salubre de l’océan : la première moitié de cet ensemble de courts chapitres rassemble en effet des notations à la fois sensibles et aiguës, par lesquelles Madézo tente d’opposer aux assauts des vagues un édifice mouvant de phrases pleines, patiemment construites. Le narrateur se coule en un « on » indéfini mais compact, enfants et adolescents amoureux du large, aventureux et fascinés. Le juste recours aux termes exacts -les risées sur l’écume, les bittes et bollards du port- comme l’afflux des couleurs et des odeurs ressuscitent ces heures émerveillées. Malheureusement, le « je » l’emporte peu à peu, et la magie discrète devient une sorte de mysticisme facile -« offrandes » aux vagues et « monstres inquiétants » dans les rochers- les risques de la nostalgie béate et de l’exotisme bretonnant -pardons et patenôtres- ne sont pas toujours évités, l’écriture s’amollit, de prévisibles « naïades » s’empêtrent dans les filets des adjectifs -et des alexandrins blancs accrochent l’oeil comme des coquillages trop propres aux vitrines des magasins pour touristes.
La Cale ronde ou
l’apprentissage maritime
Charles Madézo
Coop Breizh
90 pages, 12 euros
Domaine français La cale ronde
juin 2002 | Le Matricule des Anges n°39
Un livre
La cale ronde
Le Matricule des Anges n°39
, juin 2002.