Seul un discret grain de beauté, riveté au-dessus de l’omoplate droite, distingue les sœurs Gamal. Dévolu à Constitucion, il la pare peut-être d’un supplément d’identité, sans pour autant rompre l’impeccable ressemblance qui l’unit à Gloria. Couturières, orphelines, ces jumelles quadragénaires -les « valves d’une même coquille »- s’amenuisent dans un célibat grisâtre, sans caprices, vécu dans le nichoir de l’atelier où elles protègent leur similitude, leur malédiction. D’un fil ténu, travaillant la fine trame d’un récit pelotonné dans l’étroite perspective d’un huis clos, l’écrivain mexicain Daniel Sada accorde dans L’Une est l’autre une chance à la différence, incarnée par l’irruption d’un soupirant, Oscar. Éperonné par Constitucion, ce naïf galant deviendra une distraction partagée. Avec habileté, usant de phrases scrupuleusement élaborées, Daniel Sada bouscule ces existences rétrécies qui hésitent, par lucidité ou lâcheté, à briser le miroir où elles se reflètent jour après jour. Il les chahute jusqu’à donner envie au lecteur de déchirer ces « calques effrayants »…
L’Une est l’autre
Daniel Sada
Traduit du mexicain par Robert Amutio
Les Allusifs
112 pages, 14 €
Domaine étranger L’une est l’autre
janvier 2003 | Le Matricule des Anges n°42
| par
Pascal Paillardet
Un livre
L’une est l’autre
Par
Pascal Paillardet
Le Matricule des Anges n°42
, janvier 2003.