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Jeunesse Regarder voir

octobre 2003 | Le Matricule des Anges n°47 | par Malika Person

Avec sensibilité, Anthony Browne donne quelques clés pour aider le lecteur à mieux appréhender les œuvres d’art.Jubilatoire.

Dans Le Jeu des formes, le regard s’exerce à être attentif. Une expérience qu’Anthony Browne a vécue lorsqu’il était enfant, le jour de son anniversaire, au cours d’une promenade au musée en famille et qui lui a valu de découvrir sa vocation d’illustrateur ! C’est cette expérience pleine de jeux d’esprit et d’interprétations audacieuses qu’il a reproduite avec des écoliers alors qu’il était résident à la Tate Britain à Londres (en 2001-2002) et qu’il propose dans cet album. Une expérience sur ce que suscitent les œuvres d’art, ce qu’il y a à voir dans les toiles de maîtres et plus largement dans les illustrations de l’auteur.
La question est donc posée par le père dubitatif et se grattant la tête devant une sculpture abstraite : « Bon sang, mais qu’est-ce que c’est censé représenter ? » Pour le jeune narrateur et son frère aîné ce n’est pas la joie non plus car la visite s’annonce très ennuyeuse, les « vieux tableaux » sont « sans intérêt ». Afin de lever les réticences et les appréhensions la mère emmène sa famille devant une toile et en fait une analyse très simple. Nul besoin d’être un spécialiste en la matière pour comprendre et apprécier ! L’auteur crée ainsi une mise en confiance du visiteur nécessaire à la poursuite de la promenade dans ce lieu à la fois « superélégant » et intimidant. Alors, au fur et à mesure les toiles inertes se transforment en sujets présents et les corps des quatre personnages, d’abord réfractaires ou distants, s’impliquent parfois dans l’œuvre même (à noter au passage leurs vêtements qui d’un camaïeux de gris passe progressivement à la couleur).
Anthony Browne semble nous dire que la toile est une dimension qui nous regarde, nous concerne et nous ressemble. Nous sommes à la fois devant et dedans la toile. Profitant de la leçon, le lecteur se promène parallèlement dans les illustrations, s’y impliquant, regardant au plus près les détails, repérant les jeux de codes, d’oppositions, de symbolique, jouant au jeu des ressemblances et des différences, repérant les motifs récurrents aux autres livres de l’auteur : des murs de briques, des bananes, une tête de gorille, des grilles et des portes… Des portes qui sont autant de seuils à franchir que d’échappées du regard.
Alors, tout est permis. On soupçonne que quelque chose doit être vu : c’est le jeu des formes, sans idées préconçues. On recherche, on s’amuse, on interprète, on éprouve des émotions, des sensations : « Enfin voilà ce que j’appelle de l’art », dit le père, « Regardez ce lion. Il est TELLEMENT vrai. » On peut même détourner les toiles, par exemple voir une tête d’éléphant et un visage humain dans un paysage, ou des saucisses-nuages dans le ciel… Bref, voir au-delà de ce que nous voyons. Au final, cela donne l’impression d’un album aléatoire dont on pourrait reprocher au texte d’être un peu bavard mais il fait sens dans la mesure où il contribue efficacement à montrer le décalage entre ce que nous nommons et ce que nous ressentons (c’est le père qui représente ce décalage avec ses blagues qui tombent comme un cheveu sur la soupe. De l’humour anglais ?).
Avec Le Jeu des formes, Anthony Browne s’est défait de l’esthétique formelle de ses précédents albums pour mieux mettre à distance ses lecteurs, une distance optique qui fait partie de l’expérience sensorielle, une expérience de l’intime jubilatoire, pour les inviter à mieux y voir. Un pari réussi.

Le Jeu des formes
Anthony Browne
Kaléidoscope
Non paginé, 13

Regarder voir Par Malika Person
Le Matricule des Anges n°47 , octobre 2003.