Sous-titré « Une philosophie du vin », ce petit essai sans prétention excessive de Béla Hamvas (1897-1968) se révèle plein d’humour. L’exaltation de la sensualité se déploie en toute liberté, non sans ce qu’il faut d’ironie pamphlétaire à l’égard des bigots et des pisse-froids. Piétistes et athéistes sectaires sont renvoyés dos-à-dos lorsqu’ils prônent une austérité suspecte d’asservir autrui, de le plonger dans un triste sérieux, jusqu’à vouloir « interdire le rire » et « voir les plus belles femmes vêtues d’oripeaux informes ». Évidemment ce « livre de prière » n’a rien de religieux. Il se contente joyeusement de proposer un panthéisme dont les dieux les plus simples, mais non des moindres, sont le vin, quelques livres (de Lucien à Joyce en passant par Rabelais) et l’amour des femmes, avec juste ce qu’il faut de machisme.
Il peut sembler un peu simpliste de faire d’un léger manuel d’œnologie hongroise et de quelques maximes de bon vivant un traité de philosophie. Mais à l’aimable fougue de celui qui offre à disposition les clefs du bonheur et s’amuse à fustiger les coincés et autres piégés du ressentiment, rien d’indigne. Même si l’on joue à imaginer que le vin, « amour à l’état liquide », jaillisse « des sources et des puits ».
Si l’on ne prend pas trop au sérieux cet art de vivre, cette apologie et déification du vin, on en saura tirer un charmant antidote au puritanisme à qui « l’histoire de l’humanité doit ses batailles les plus sanglantes et ses révolutions les plus terribles ».
Un livre de priÈre pour les athées de Béla Hamvas - Traduit du hongrois d’après la version anglaise par Béatrice Vierne, Anatolia/Le Rocher, 144 pages, 16,90 €
Histoire littéraire Coups de carafe
septembre 2005 | Le Matricule des Anges n°66
| par
Thierry Guinhut
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Coups de carafe
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°66
, septembre 2005.