La revue Po&sie, que dirige Michel Deguy, fête ses trente ans et offre, pour l’occasion, un volume imposant autour de la pensée poétique, qu’elle se comprenne dans l’ordre du poème, du roman, dans la logique de la traduction, qu’elle appartienne aux écritures musicales, chorégraphiques, au cinéma et à la peinture. Le numéro s’ouvre d’abord par des traductions inédites de Melville - un extrait du poème narratif Clarel -, auquel s’ajoutent des essais, dont celui de l’historien Carlo Ginzburg sur Coleridge. Suivront, selon un programme au titre heideggerien (« Bâtir/habiter/penser »), deux textes sur l’habitation et ses prémisses (Zanzotto et Sereni), celui, sorti presque d’un usage de cartographe, de Tim Robinson (La vue depuis l’Errisberg) ou encore Un vol, du poète chinois Yu Jian, qui entrecroise des régimes de proses disparates pour traverser le monde et ses mémoires à bord d’un avion. La section musicale propose un dossier sur l’œuvre de György Kurtág, une étude de Hédi Kaddour (que l’on retrouve dans Po&sie & roman dans un entretien éclairant l’écriture de Waltenberg) sur l’interprétation musicale de Schumann d’une partie du Livre des chants de Heine, ainsi qu’un article impressionnant de Georges Didi-Huberman sur Olé de John Coltrane. Retenons aussi une longue conversation d’Olivier Apert avec le cinéaste Eugène Green, Claude Mouchard et le chorégraphe Josef Nadj, et un entretien rare (1963) de Louis-René des Forêts sur Proust.

Po&sie N°120 - 396 pages, 30 € (Éditions Belin)