Le 16 septembre, Marseille aurait dû faire la fête. Christine Albanel, ministre de la Culture, venait en fin d’après-midi de déclarer que la ville l’avait emporté sur Lyon, Bordeaux et Toulouse et que la cité administrée par Jean-Claude Gaudin serait donc Capitale européenne de la culture en 2013. Un titre qui n’a rien d’honorifique : la manne financière est une aubaine. Contrairement à ce qu’en ont dit les journaux télévisés le soir même, la victoire de Marseille ne signe pas tant le succès d’une politique culturelle que ses échecs. En effet, le principe du label, créé pour la première fois en 1985 (Athènes est historiquement la première capitale européenne de la culture), consiste à venir en aide à une ville (une région pour ce qui est de Marseille) pour lui permettre de réaliser de gros projets structurels. Et de financer des équipements qui faisaient défaut. Restait à convaincre les jurés. Et, une fois n’est pas coutume, on a vu sur ce combat-là une sorte de front commun des élus marseillais.
Marseille aurait donc dû faire la fête ce 16 septembre dernier. Mais c’était sans compter sur Steven Gerrard et ses coéquipiers des « reds devils » de Liverpool que le Stade Vélodrome accueillait pour la première journée de la ligue des champions de football. D’un maître tir à l’entrée de la surface de réparation et d’un penalty, le meneur de jeu de Liverpool éteignait l’enthousiasme de toute une ville. Ou peut-être permit-il à quelques-uns de sourire malicieusement : pour une fois, dans la cité phocéenne, la culture faisait mieux que le foot.
Le lendemain Radio Grenouille proposait une émission avec Bernard Latarjet le directeur de Marseille 2013 et quelques acteurs culturels (mais point de représentant du livre…). Une émission dont le prolongement était résolument festif puisque la soirée s’est prolongée au Cabaret Aléatoire au Grandes Tables de la Friche (www.lafriche.org), haut lieu culturel de la ville où l’on peut croiser parfois l’écrivain Jean-Pierre Ostende.
Marseille 2013 pourrait peut-être donc donner quelques espoirs aux acteurs de la vie littéraire. Encore que ceux qu’on a pu rencontrer faisaient montre de plus de fatalisme (ou de lucidité) que d’optimisme. La ville, par le passé, a plus régulièrement raté ses rendez-vous avec la littérature, qu’elle ne les a réussis. Quand on demande à Roland Alberto, libraire à L’Odeur du temps ce que Marseille 2013 devrait apporter à la ville, il se dit amer : « ça ne va rapporter qu’à Bouygues et Vinci, parce que l’argent servira essentiellement à bâtir des tours. Il ne faut pas être naïf. »
C’est un autre des paradoxes qu’on pourrait noter autour du Vieux Port : Marseille bénéficie de la réputation d’être à la fois la plus romanesque ville de France et celle où on lit le moins. Si la première assertion est purement subjective, la seconde reposerait sur le faible nombre de mètres carrés de librairies par habitant qu’on y recense. Malgré la création récente de trois librairies...
Marseille L’ébullition marseillaise
La cité phocéenne n’est pas à un paradoxe près. Alors que Marseille vient d’obtenir le label de capitale européenne de la Culture pour 2013, sa vie littéraire la rangerait loin du peloton de tête des villes les plus dynamiques dans le domaine du livre. Ce n’est pourtant pas faute de forces vives. Petit tour d’horizon.