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Domaine français Anna ou l’ardeur

octobre 2008 | Le Matricule des Anges n°97 | par Richard Blin

Quand l’imprévisible porte le présent à son point d’incandescence. Le récit de Pierre Mari a la beauté d’un enchantement.

L' Ange incliné

C’est à un jardin qui refleurit que fait penser le deuxième roman de Pierre Mari. Un livre qui retrouve la lumière du baptismal, raconte la reconquête de l’étonnement d’être et rappelle, qu’au fond, la seule façon de vivre – et de mourir – consiste peut-être à faire confiance à ces lignes de hasard et d’énigme qui, nous soustrayant à l’atonie, nous laissent libres et souverains, sur des chemins de crête ou d’osmose.
Au tournant de la quarantaine, confronté au sens à donner à sa carrière d’universitaire, et taraudé par la nécessité vitale de rester fidèle à « une poignée d’images de jeunesse », le narrateur refuse de céder aux sirènes du renoncement. Son père est mort depuis peu, sa mère glisse doucement dans la vieillesse, sa jeune sœur souffre de maladie mentale et ses collègues de l’université forment « une confrérie d’impuissances où l’amertume de l’un aide le cynisme de l’autre à trouver son assise, où chacun alimente en maximes sonores l’abdication de tous. » Attendant un souffle, un événement qui l’arracheraient à ce « cercle désenchanté », le narrateur va alors faire une rencontre magique. « Pour la première fois de ma vie, j’étais aspiré dans ce cercle où il est donné de rêver d’une femme en sa présence ».
La façon qu’elle a de créer du temps hors du temps.

Elle rayonne, elle subjugue. Elle a 24 ans et se prénomme Anna. Leur complicité est d’emblée, totale, instinctive : une spirale de grâce et d’évidence. « Ce qui m’arrivait était impossible - et généreusement évident : un visage tout neuf, qui ne découlait pas de ma vie d’avant, que rien n’annonçait - un visage dont la moindre péripétie se tenait à la hauteur de mon imagination. » Comme si l’ange de l’amour en personne l’avait élu, tant elle symbolise l’éclat nu de l’origine, la merveille de tout ce qui déborde les décrets de la raison.
Ils vont passer quelques jours ensemble dans une petite ville dont l’espace semble se réordonner selon des lignes de force totalement inédites, faire une brève escapade en montagne, profiter d’un temps précieux. Car Anna ne cache rien. La révélation qu’elle incarne se double d’un retrait. Elle va bientôt quitter la France avec l’homme qui est déjà dans sa vie…
Mais qu’importe ! Ce qui compte c’est ce qu’Anna inocule d’insolence dans le devenir, de foi en la puissance d’incongruité et d’ivresse de la vie. L’important c’est l’envie qu’elle donne d’explorer l’inéluctable, la façon qu’elle a de créer du temps hors du temps, d’enrouler sa présence à l’évidence, d’accorder l’instant à tout l’espace du désirable. De par sa simplicité fécondante, c’est le monde qu’elle réenchante. Comme si, à la manière des formules qui, dans les contes de fées, délivrent du sortilège, elle était cette messagère venue d’ailleurs, rendre au narrateur son sens de l’intransigeance. Lui apporter le courage d’échapper au cercle infernal des aigreurs et des insatisfactions et de quitter une université condamnée à la faillite. Une histoire authentiquement pure, c’est-à-dire débarrassée de toute idée de possession. « Je vivrai avec toi, lui dit-elle, je vivrai sans toi, ce sera les deux ensemble, aussi fort et aussi loin que je pourrai. »
Et de cette poussière d’infini et d’éternité dont Elle éclaire chaque instant, Pierre Mari nous fait partager l’éblouissante harmonie. En une écriture qui épouse l’allant et la mobilité de ce qui emporte et traverse les deux élus, c’est la musique de ce qui leur arrive qu’il nous donne à entendre. Entre ce qui est dit et ce qui est tu - car l’ensemble est admirable de pudeur, elle accompagne un texte à recevoir comme un prisme reçoit la lumière, et avec ce désir de décentrement qui ouvre à tous les possibles.

L’Ange incliné de Pierre Mari
Actes Sud, 224 pages, 18

Anna ou l’ardeur Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°97 , octobre 2008.
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