Big blues eyes (suivi de) Sfumato (et de) Dans ton dernier visage
Les éditions Quartett publient un recueil de trois pièces de Dorothée Zumstein sur des destins de femmes qui basculent. Une bascule qui prend des allures de faits divers, quelques lignes dans un journal aux gros titres… Big blue eyes est inspirée par l’histoire de Mary Bell qui, en Angleterre en 1968, alors qu’elle avait 10 ans, a tué deux enfants de 3 et 4 ans dans son quartier. L’écrivain rebaptise le personnage Mary Burns et imagine un entretien télévisé donné par elle à 40 ans, pour comprendre ce qu’il y a dedans cette histoire. Cette interview est le point de départ pour tisser un lien par la voix entre la fille, la mère et la grand-mère, pour que se dise enfin le secret familial qui pèse comme une malédiction sur cette famille et aboutit au meurtre. Mary Burns va reconvoquer le passé, tous les temps vont se mêler, Mary Burns enfant, vêtue de son manteau rouge à capuche, sa naissance et l’inavoué de sa conception… Dorothée Zumstein visite le monde de la douleur, qui fige les corps et les âmes dans des postures intenables. Elle rythme ses paroles de suspension, de silences, de comptines, c’est une parole-confession qui se cherche, se chuchote presque. Une parole quasi chorale entre ces trois femmes. Une confession offerte à l’enfant de Mary Bell, une fille elle aussi, pour qu’elle n’ait plus à porter le fardeau du secret. Il y a quelque chose de prenant dans ce processus de dévoilement, qui tient du film policier. Les deux autres textes Sfumato et Dans ton dernier visage ont été écrits en amont. Ce sont deux monologues de facture plus classique. Deux destins de femmes, Marie et Violette, elles aussi figées sur un malheur, repliées dans leur mystère qu’elles tentent de nous dévoiler.
BIG BLUE EYES (SUIVI DE) SFUMATO (ET) DANS TON DERNIER VISAGE
de DOROTHÉE ZUMSTEIN
Quartett, 112 pages, 12 €