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Théâtre George Kaplan est partout

janvier 2013 | Le Matricule des Anges n°139 | par Patrick Gay Bellile

Frédéric Sonntag joue avec la théorie du complot tout au long d’un texte malin et captivant.

George Kaplan. Ce nom est pour tous les amateurs de cinéma un véritable sésame ouvrant la boîte aux images : Cary Grant pourchassé par un petit avion dans un champ de maïs, Cary Grant sur le Mont Rushmore, Cary Grant embrassant sa femme alors que le train passe sous un tunnel, c’est La Mort aux trousses, bien sûr ; et l’introuvable George Kaplan, un leurre inventé par les services secrets américains pour piéger un terrible espion venu de l’Est.

De qui est-il le nom ?

Aujourd’hui, Fréderic Sonntag s’empare du mythe. Et il y va franchement. Un groupe d’activistes, on pense à l’ultra gauche, on pense à Tarnac, prépare une action artistique sous la forme d’impostures médiatiques et culturelles. Ils lisent leur projet, masqués, devant une petite caméra. Mais très vite, l’humour vient faire éclater le sérieux de la petite réunion. « Non mais çà sert à rien là, j’ai, non mais j’ai pas les yeux en face des trous là, je vois rien, et puis… et puis c’est ridicule de lire avec un masque, soit on lit soit on porte des masques… » Et le dénouement nous ramène à des réalités plus quotidiennes, plus inquiétantes surtout. La deuxième partie met en scène des scénaristes à la recherche d’un projet télévisé pour un mystérieux commanditaire. Des scénarios cousus main où tout est pensé, étudié, calculé, car « on répond à un certain fantasme. Un certain… imaginaire du public. » Enfin, dans la troisième partie, un groupe de dirigeants mondiaux, ultra cyniques et conservateurs, visent à faire passer leurs idées en manipulant l’opinion. « Régle n°1 : Mobiliser des émotions simples telles que la peur, la solitude, le besoin de protection. Un danger sans visage permet de mobiliser des peurs primitives, de faire appel au registre émotionnel pour paralyser le sens critique des individus. (…) Règle n°2 : Captiver et maintenir l’attention des citoyens. » Nous sommes en 2012, dans un monde manipulé par les informations, vraies ou fausses, les périls imaginaires, les images, les complots, la peur de l’autre. Sonntag mène sa barque si finement que rapidement on ne sait plus si la première partie ne serait pas l’un des scénarii inventés par les auteurs de la seconde, dont le commanditaire serait peut-être le mystérieux groupe de dirigeants, eux-mêmes pouvant constituer un scénario très plausible. Tout est vrai, tout est faux. Et les dénouements de chaque partie sont toujours surprenants, chacune constituant comme un petit court-métrage qui vient prendre sa place dans un ensemble plus grand. Le seul point commun, la seule chose dont tout le monde est sûr, c’est que le danger s’appelle George Kaplan.
Fréderic Sonntag s’amuse, mais brillamment. Il multiplie les indices, les dédoublements, les croisements, les références aussi, il nous mène en bateau si bien que livre refermé, il n’est plus qu’une envie, celle de le relire. Parce qu’en avançant dans la lecture, les choses apparaissent, et semblent s’éclaircir, parce que comme dans un puzzle ou un très bon polar, rien n’est laissé au hasard. Tout cela pour poser une question essentielle : qu’est-ce qui est vrai ? Qui nous manipule et dans quel but ? De quoi George Kaplan est le nom ? Lorsque Jean-Luc Godard remet en question les images des premiers pas sur la lune, disant que « ce direct est un faux », il oublie juste de dire que ce projet de la NASA aurait pu s’appeler George Kaplan.
Ce qui est troublant ici c’est que les caméras sont partout, mais que l’on ne sait pas toujours qui filme. Comme si une instance supérieure observait à distance l’espèce humaine en proie à ses doutes, à ses peurs, à son goût pour l’irrationnel. L’homme croit en Dieu, il peut bien croire en George Kaplan. Et nous-mêmes en venons à douter. Le dernier personnage est-il le véritable George Kaplan ? Ou bien le lecteur lui-même ? En tout cas il semble le seul à se demander pourquoi il y a une caméra dans sa chambre d’hôtel. Ce livre que nous tenons en main, ne s’appellerait-il pas en fait Frédéric Sonntag, écrit par un certain George Kaplan ?

Patrick Gay-Bellile

George Kaplan
Frédéric Sonntag
Éditions Théâtrales / Journées de Lyon des auteurs de théâtre, 80 pages, 13

George Kaplan est partout Par Patrick Gay Bellile
Le Matricule des Anges n°139 , janvier 2013.
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