Dans le monde d’André Bucher, les montagnes et les rivières, les nuages et les oiseaux, les ours et les truites, les hommes et les loups, sont reliés par la course de la lune et du soleil. Il suffit pour le constater de se rendre « Au-dessus de Sisteron, vallée du Jabron, les montagnes les attendent. Blanches. (…) Ce pays, on le quitte ou on l’abandonne. » Un pays dur, âpre, parce qu’il faut débiter le bois pour l’habiter, et se méfier des loups. Mais sa beauté est telle que les hommes n’ont d’autre choix que de le respecter, et d’autre destinée que de le transmettre aux générations suivantes. Et c’est ainsi que les bûcherons et les paysans des Alpes-de-Haute-Provence sont les plus grands poètes que ce territoire ait jamais portés. C’est cette voix, venue du fond des âges, qui accompagnera les pas du jeune Jérémie. Enfant unique, qui a peu connu son père Daniel, il quitte sa mère pour retrouver la ferme de ses grands-parents paternels, Samuel et Jeanne. Mais le vieux vient de mourir.
La ferme de Jeanne devient le lieu des retrouvailles entre le père et le fils, autour du grand absent. Mais il y a Paul, le bûcheron, et fidèle ami du grand-père. Trois générations, trois solitudes, se retrouvent pour mener à bien la dernière coupe sur laquelle travaillait Samuel au moment de sa mort. « Si l’on chemine seul dans la tempête, leur avait indiqué Paul, au milieu de la nuit et des arbres, la principale épreuve concerne moins les éléments déchaînés que de se confronter avec sa propre peur pour éviter qu’avec le froid, elle ne se glisse à l’instar d’une entaille, à l’intérieur de vos os. »
André Bucher réunit des personnages qui veulent survivre : Daniel en quête de son fils, Jérémie qui veut reprendre la ferme, et Paul qui guidera ses compagnons dans cette période de deuil et de renaissance. Il y a de l’ethnologie dans les récits de Bucher, une connaissance fine de la vie en montagne, soutenue par une puissante langue poétique magnétique qui rassemble la terre et le ciel. Et les hommes entre eux.
Virginie Mailles Viard
Le Pays qui vient de loin, d’André Bucher
Sabine Wespieser poche, 184 pages, 9 €
Poches Le Pays qui vient de loin, d’André Bucher
juillet 2017 | Le Matricule des Anges n°185
| par
Virginie Mailles Viard
Un livre
Le Pays qui vient de loin, d’André Bucher
Par
Virginie Mailles Viard
Le Matricule des Anges n°185
, juillet 2017.