Texte écrit pour les adolescents à partir de questions posées par l’auteur à des collégiens et lycéens, H.S. Tragédies ordinaires parle de la violence, de ses dérives, de ses enchaînements. Et comment finalement les rapports hiérarchiques, parents/enfants, enseignants/ élèves, administration/enseignants, entretiennent cette violence, la nourrissent, l’incarnent même parfois, tout en la condamnant et se donnant pour mission de la combattre. La pièce est écrite à la manière d’une tragédie grecque, avec son prologue, son épilogue, et les interventions régulières d’un chœur qui rapporte ici, sous forme de listes, les propos entendus, les explications données, les insultes échangées. Elle se compose de plusieurs scènes indépendantes, qui sont comme un florilège de cas de violences, mais dont on perçoit bien le lien qu’elles peuvent avoir entre elles, un personnage d’une scène semblant se retrouver dans une scène suivante. Et puis, comme une basse continue, une mère tente de faire le deuil d’un enfant mort. C’est la richesse du texte de nous montrer par exemple le harcèlement scolaire via les réseaux sociaux, non pas comme un phénomène en soi, isolé, que l’on pourrait traiter puis éradiquer à la manière d’une infection localisée, mais bien comme faisant partie d’un tout, d’une société violente qui à tous les niveaux pratique le harcèlement. Et demande à ses membres de se taire surtout. « Pour ne plus avoir à parler mais juste à caqueter. Comme vous. Caqueter pour me taire. Puisque c’est de ça dont il s’agit. Apprendre à se taire. » Ce professeur de français rencontre des problèmes avec une classe, et espère trouver une aide auprès de ses collègues et de la direction ? Il se voit renvoyé à sa propre incapacité et aux effets fâcheux qu’elle pourrait avoir sur la bonne image de l’établissement. Avec comme conséquences, le sacrifice de certains élèves sur l’autel des réputations : « Les éléments perturbateurs, débarrassez-nous en, refourguez-les aux filières technologiques et professionnelles, qu’on en soulage les filières générales ». Une langue précise, rapide, et sans fioritures, pour un texte coup de poing. PGB
Quartett, 112 pages, 12 €
Théâtre H.S. Tragédies ordinaires de Yann Verburgh
septembre 2019 | Le Matricule des Anges n°206
| par
Patrick Gay Bellile
Des livres
H.S. Tragédies ordinaires de Yann Verburgh
Par
Patrick Gay Bellile
Le Matricule des Anges n°206
, septembre 2019.