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Poésie Le poète torrentueux

mai 2022 | Le Matricule des Anges n°233 | par Éric Dussert

Emanuel Carnevali a suivi un parcours exubérant et douloureux marqué du sceau du talent et du caractère.

Le Splendide Lieu commun

Quasi contemporain d’Ezra Pound, l’Italien Emanuel Carnevali (1897-1942) est entré tardivement dans notre sphère linguistique. Après les traductions sporadiques des années 1980, ses proses et sa poésie nous sont apportées en deux opus. Il y eut d’abord Le Premier Dieu (La Baconnière, 2015), puis ce Splendide lieu commun, poésie réunie et traduite toujours par Jacqueline Lavaud, qui présente utilement l’œuvre de cette comète et les grandes lignes de sa vie.
Poète jusqu’au bout, Emanuel Carnevali aura écrit comme on se laisse glisser, à corps perdu, embarqué par une volonté et une excitation intenses, dans une tension intérieure qui confinait à la violence et, paradoxalement, le poussait à la dérision. « J’en suis si farouchement égoïste/ que lorsqu’un de mes amis était à l’agonie,/ je pensais immédiatement aux cinq lires que je lui devais/ et que je n’aurais pas à lui rendre. » Sans compter la maladie qui vint le frapper au pire endroit, le cerveau, il se serait fait mieux remarquer. L’encéphalite néanmoins décida de le renvoyer sur ses terres italiennes, alors qu’il était parvenu à faire de son séjour américain si productif une période inspirante pour tous. Installé aux États-Unis à l’âge de 16 ans, en 1914, il avait fait en quelques années son trou, rencontrant les plus grands poètes de sa génération, dirigeant quelque temps la revue Poetry, polémiquant même avec William Carlos Williams, engagé qu’il était en faveur de l’épure. Pour dégager la poésie américaine de ses apprêts, lui, l’autodidacte qui avait appris l’anglais en observant les enseignes de magasins, avait engagé le combat. Une langue anglaise qu’il n’abandonna plus… Quand bien même il est rentré en Italie en 1920 pour se faire soigner, et rédige à l’hôpital de Bazzano Le Premier Dieu, son autobiographie.
Ce « torrent impétueux » de Carnevali avait donc dès 1918 obtenu sa légitime place. Sa poésie directe, parfois brutale impressionnait ses pairs. Chantre de la « misère américaine », Carnevali était en même temps le héraut des massacrés du système et le fer de lance de la correction des faits. « Combien de fois dans les rues de Manhattan/ Ai-je vomi ma haine !/ Combien de fois dans ces rues/ Ai-je supplié l’Univers/ D’interrompre ce va-et-vient insensé,/ Ou de m’entraîner moi aussi dans/ L’oubli de cette hâte. »
Ses poèmes qu’il nous est donné de lire aujourd’hui, depuis les « Mensonges coloriés » de sa toute première période new-yorkaise jusqu’à « Splendide lieu commun », englobent sa vie, y compris les deux dernières décennies carbonisées par la maladie qui l’exclut du monde des vivants, comme une sale revanche contre celui qui l’avait tant chanté, mais aussi tant honni… Si la misère n’a jamais été une école de la grandeur, la poésie, en revanche fut de Carnevali la nette rédemption.

Éric Dussert

Le Splendide Lieu commun
Emanuel Carnevali
Traduit de l’anglais (États-Unis) par J. Lavaud
La Baconnière, 258 p., 20

Le poète torrentueux Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°233 , mai 2022.
LMDA papier n°233
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