Un livre

Où la chanson va

de Sébastien Ménestrier

Editions Zoé

Béla Bartók est beau avec ses cheveux blancs. Il arpente les villages de Roumanie et de Hongrie, pour enregistrer la musique traditionnelle. « Elle est à lui bien sûr, Bartók, le chercheur d’or, celui qui reçoit les lauriers. Mais cette danse, quelqu’un la lui a donnée. » Pour la jeune femme qui raconte l’arrivée de « l’étranger  », Bartók est venu voler, distribuant de la viande séchée pour que s’élèvent les chants des femmes. « Elles ont eu mille ans. Elles ont frappé le sol de leur pied et l’on fait trembler. » La narratrice ne le laissera pas repartir sans prendre en retour. Ainsi va le dernier ouvrage de Sébastien Ménestrier, finaliste du prix Goncourt du premier roman pour Pendant les combats (Gallimard, 2013). Si la musique est une alliée qui l’accompagne depuis toujours – « La musique n’est pas l’écriture, elle ne fait pas mal. Pas de combat.  » – elle est le point de départ de ce recueil de nouvelles, où les personnages vont devoir affronter le danger, qui tient en alerte puisqu’«  On ne sait jamais avec le danger si on va s’en tirer.  » Alain Bashung, Nina Simone, Brahms, Gershwin, Amy Winehouse, Babx, Thom Yorke, Nick Cave, sont pris au piège de ces récits, personnages lumineux et égarés qui cherchent la paix, et la liberté. Bashung est recueilli par un homme solitaire vivant à la lisière de la forêt. Amy Winehouse, qui ne peut plus chanter, apprend à nager dans une rivière grâce à un jeune choriste. Scènes bucoliques, bêtises d’adolescents, moments de frayeur et instants de grande sensualité, Ménestrier dresse pour ces artistes au bord du précipice un écrin plein de grâce et de volupté. Les chansons et les pièces musicales sont à retrouver via un flash code à la fin de l’ouvrage, et la magie opère : les musiques à l’origine des nouvelles nous ramènent aux récits. Amy restera indéfiniment flottant, heureuse, à jamais libre.

Virginie Mailles Viard

Où la chanson va
Sébastien Ménestrier
Zoé, 144 pages, 16,50 €