auteur Jorge Luis Borges
A propos
Le grand mystificateur
La multiplicité des sens d’une œuvre essentiellement composée de textes courts qui semblent toujours s’appuyer sur d’autres, réels ou fictifs, ne cesse de nous rappeler l’inutilité de toute tentative d’épuiser le travail de Borges. L’auteur de L’Aleph aura su édifier depuis la position périphérique de Buenos Aires, ville où il est né en 1899, une histoire universelle de la lecture.
C’est la force paradoxale des classiques : leur omniprésence les condamne au lieu commun. Ainsi de Kafka, trop souvent résumé à un adjectif aussi commode que vague, la forêt du « kafkaïen » ayant tendance à simplifier, voire à contredire, la réalité de son œuvre. Même chose lorsqu’est brandi l’étendard du « borgésien » : une fois qu’on aura hâtivement convoqué l’encyclopédisme, les labyrinthes, les tigres et les miroirs, on n’aura rien dit. D’une certaine manière, les œuvres des écrivains qui modifient durablement notre façon de lire (thème « borgésien » s’il en est) sont trop grandes...
Lecteur par excellence
Venue d’Argentine à 10 ans, la romancière Laura Alcoba qui partage avec Borges un intérêt pour le tango évoque la place de l’auteur de L’Aleph dans la société argentine.
Laura Alcoba, vous écrivez vos romans en français mais vous êtes originaire d’Argentine. Quand on commence à écrire et qu’on est Argentin, la figure de Borges est-elle libératoire ou encombrante ?
Dans les années 60 et 70, on s’est beaucoup plaint en Argentine du caractère écrasant de la figure de Borges, ce trop grand auteur qui ne pouvait qu’inhiber les jeunes écrivains. Durant ces années,...
Le désir de savoir
Arpenteur insatiable de toutes les bibliothèques, le romancier Pierre Senges (auteur notamment de Achab) pourrait être une des métempsycoses de Borges. À moins que ce ne soit l’inverse, dirait l’Argentin.
Pierre Senges, « La Bibliothèque de Babel » nouvelle du recueil Fictions commence ainsi : « L’univers (que d’autres appellent la Bibliothèque) (…) ». Cet incipit établit une synonymie entre le monde et le livre que l’on va retrouver à maintes reprises chez Borges et notamment dans ses Conférences. Des mythes avec lesquels l’écrivain joue ou sur lesquels il s’appuie, celui du monde-livre...