L’écriture poétique de Yaël Cange nourrit une incessante irritation. Née d’un drame qui en constitue son soleil noir, la phrase de ces poèmes s’érige en lambeaux, vidée de sens parfois, mutilée, hachée, redondante. Ce qui est infigurable (l’absence) est aussi indicible, mais la douleur au moins peut constituer comme la partition d’un chant d’où l’harmonie est exclue. Le verbe souvent n’est qu’un souvenir (« Torture - lors. De ce que partout - bouches closes, bras, mains, se détournant : non avouée, ni dite »). La lecture de ce recueil est âpre, difficile et l’irritation qui peut en naître s’alimente aussi de ce sentiment désagréable d’être le témoin d’un narcissisme exacerbé et violent. Mais, comme l’on dit parfois de certains chanteurs pour lesquels on ne saurait dire plus, Yaël Cange a une voix.
Dumerchez
BP 356 60312 Creil Cedex
178 pages, prix n.c.
Domaine français L’infigurable
septembre 1995 | Le Matricule des Anges n°13
| par
Thierry Guichard
Un livre
L’infigurable
Par
Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°13
, septembre 1995.