Ils sont quatre compères de chantier et de minable chambrée, à s’abrutir d’alcool dans les boîtes miteuses d’une petite ville de Hongrie. La vingtaine passée, Madari, Vari, Barna et le beau Laboda rêvent de grosses voitures et d’abondance mais ne voient pas plus loin que le bistrot du coin. Un jour, un mystérieux contrat en Allemagne les décide à laisser la piaule qu’ils louent au-dessus d’un entrepôt de produits chimiques et leur misérable vie en terre magyare pour les mirages de l’Ouest.
Mais c’est une vie plus misérable encore qui attend ces étrangers, tout juste bons à enfouir les déchets suspects de la société capitaliste pour le compte de Földi, un riche compatriote qui joue vaguement de leurs origines communes pour mieux les exploiter.
Pour arrondir sa maigre paye, Laboda se déshabille la nuit pour des dames en mal de beaux garçons jusqu’au jour où ses camarades le retrouvent à demi-mort au milieu des déchets à enfouir…
Sans complaisance comme le monde qu’il évoque, dans un style direct, rapide et simple, Sandor Tar emprunte la langue d’un milieu qu’il connaît bien -il a été ouvrier puis contremaître dans une usine- pour faire tomber le décor de la société post-industrielle.
Né en 1941 dans une famille de paysans du nord-est de la Hongrie, Sandor Tar se reconnaît plus volontiers comme ouvrier que comme intellectuel. Et si l’on devine un tempérament de militant, la critique sociale et politique passe ici plus sûrement par la narration que par le discours.
Paru en 1995 en Hongrie, ce premier roman révèle un véritable auteur. On espère que la publication annoncée d’un précédent recueil de nouvelles, en cours de traduction, nous le confirmera.
Tout est loin
Sandor Tar
Traduit du hongrois
par Patricia Moncorgé
Actes Sud
102 pages, 68 FF
Domaine étranger Les mirages de l’Ouest
mars 1997 | Le Matricule des Anges n°19
| par
Maïa Bouteillet
Un livre
Les mirages de l’Ouest
Par
Maïa Bouteillet
Le Matricule des Anges n°19
, mars 1997.