Pourquoi les femmes ont-elles été vouées au silence ? Par quelles monstrueuses machinations, par quels écrasements moraux et politico-religieux les a-t-on emmurées en elles-même, dans l’ignorance la plus noire, dépossédées de leur corps, de leur âme ?
Ce roman ne répond pas à ces questions. Il témoigne, décrit une petite paysanne issue d’un monde sans relief, sans histoire, refermé sur lui-même et qui épouse un homme qu’elle ne connaît pas, qui ne lui parle pas. Une histoire banale, de soumission qui n’a même pas cinquante ans. « Quand il explose en elle, elle glousse à cause des cicatrices si bien qu’il croit la satisfaire. La sève coule entre ses cuisses. Presque toujours elle préfère l’essuyer. » De cette union, naîtra une fillette, fruit de tous les désirs, les espoirs maternels. Les mois passeront, l’enfant se révèlera cassé puis mourra.
Mettre des mots sur le silence qui l’a engendré, raconter l’histoire de sa mère, retrouver sa place auprès d’elle, son amour, c’est le pari de ce premier roman d’une quadragénaire d’origine bretonne. Françoise Renaud sans nostalgie tente de se rapprocher de sa mère, en la réinventant, avant que cette dernière ne s’efface. Les mots sont simples, empreints de pudeur, de douceur, posés par petites touches. Ils révèlent les gestes infimes, les maladresses, les rougissements, l’humilité, les émois tus. Le texte est ainsi ponctué de frémissements, moments de grâce qui parviennent à occulter quelques scories : lourdeurs de style, redondances.
Le préambule, dans lequel l’auteur explique le pourquoi de ce livre, les relations pas toujours faciles à sa mère, sa culpabilité, se révèle mal arrimé au reste du livre.
L’Enfant de ma mère
Françoise Renaud
HB Editions
146 pages, 80 FF
Premiers romans Silence de la mère
janvier 1998 | Le Matricule des Anges n°22
| par
Dominique Aussenac
Un livre
Silence de la mère
Par
Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°22
, janvier 1998.