Le poème Blanc sur noir de Jean-Christophe Bailly, écrivain et essayiste, s’étire, verticalement, sur 12 pages. Celui-ci ne saurait pourtant être un amuse-bouche. Blanc sur noir est tel quel un poème d’insomnie écrit d’une traite. Faisant écho à « L’homme poursuit noir sur blanc » de Celan, inversant les deux derniers termes, ce poème s’ouvre d’abord sur des images de neige et de charbon, comme un plan lent de cinéma. Parce qu’un homme se souvient de la traversée du pont de la Spree, à Berlin, de la neige sur des péniches chargées de charbon, il se souvient de Celan, Szondi, Ghérasim Luca, qui se sont tous jetés d’un pont et noyés, de l’assassinat de Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht, eux aussi jetés dans le Landwehrkanal. Mais cet homme traverse le pont, ne se jette pas. C’est lui qui écrit, parle, c’est le vivant qui fait signe à ceux de l’autre rive. Cette tension, dans la langue même, bouleverse.
Éd. William Blake & co
15 pages, 45 FF
Poésie Blanc sur noir
janvier 2000 | Le Matricule des Anges n°29
| par
Emmanuel Laugier
Un livre
Blanc sur noir
Par
Emmanuel Laugier
Le Matricule des Anges n°29
, janvier 2000.