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Domaine étranger Hippo-on-Thames

septembre 2000 | Le Matricule des Anges n°32 | par Eric Naulleau

Homme de cinéma et de théâtre, Stephen Fry s’essaie à un deuxième roman qui peine à passer la rampe. Son hippopotame est boiteux.

L' Hippopotame

Contrairement à ce que laisse entendre le communiqué de presse du présent livre, Stephen Fry (né en 1957) n’a d’autre rapport avec Oscar Wilde que celui d’avoir interprété à l’écran le rôle de l’auteur du Portrait de Dorian Gray. S’il fallait situer notre homme (plus connu pour ses diverses activités cinématographiques) dans le paysage des lettres britanniques, ce serait plutôt entre Jonathan Coe et Tom Sharpe, avec un œil en coin vers les inaccessibles hauteurs où planent les Amis père et fils (soit, par ordre croissant d’élévation, Kingsley et Martin). Le lecteur français ne risque en outre guère de se trouver dérouté par la lecture de L’Hippopotame (il s’agit du sobriquet attribué au personnage principal) tant ce roman s’inspire d’une recette très en vogue depuis quelques années chez les auteurs d’outre-Manche : certain individu (généralement un écrivain raté ou aigri, de préférence alcoolique, misanthrope et misogyne) est chargé ou se charge d’une enquête qui lui donne l’occasion de brosser au passage un portrait des moins flatteurs de l’establishment anglais -ce que résume ici la formule « décaper les traditions de leur élégant vernis pour mettre au jour le robuste bois anthropologique du tabou tribal. » Stephen Fry respecte scrupuleusement ces conventions en imaginant un affreux jojo londonien -lequel vomit continûment un flot d’anathèmes et d’insultes à l’endroit de tout ce qui, ici-bas, vit, respire et surtout écrit- engagé à prix d’or par une riche leucémique pour tirer au clair divers cas de guérison miraculeuse survenus dans sa famille. Ce Poirot en herbe découvre bientôt que le jeune faiseur des prodiges en question opère beaucoup plus en profondeur qu’il n’y paraissait tout d’abord (la pudeur nous interdit d’entrer dans les détails, ce qui n’est certes pas le cas de l’auteur !) et l’intrigue claudique son petit bonhomme de chemin. La seule touche personnelle du romancier, le seul piquant de ce pudding littéraire très british consiste en une incursion dans l’arbre généalogique de l’apprenti-sorcier, ce qui nous vaut un passage fort réussi dans l’Europe centrale d’entre les deux guerres, avec notamment ce retour aux sources d’un homme d’affaires anglais d’origine juive qui découvre le sort réservé à ses coreligionnaires viennois à la veille du cataclysme mondial : « Là, dans cette abominable petite pièce puante, Albert prêta une nouvelle allégeance, allégeance à son peuple -ce peuple stupide, geignard, sans défense, ce peuple doué pour agacer l’univers, ce peuple dont il méprisait la religion, raillait la culture, abhorrait les manières et les préjugés. » Dommage que l’auteur ait préféré les sentiers balisés du best-seller prévisible (à tous les sens de l’adjectif) à ces chemins de traverse.
Si l’ensemble se lit en définitive sans déplaisir, nul doute que Stephen Fry eût cependant reçu un bon coup de règle sur les doigts de la part de sa consœur Agatha Christie pour punir son excès de désinvolture quant au coup de théâtre final -sans compter que l’on risque toujours d’attraper de mauvaises ampoules à force de manier d’aussi grosses ficelles littéraires. Walt Disney (rappelons-nous de Fantasia) demeure décidément le seul chorégraphe qui soit parvenu à faire évoluer un hippopotame avec toute la grâce souhaitable.

L’Hippopotame
Stephen Fry
Traduit de l’anglais par
Christiane et David Ellis
Belfond
360 pages, 125 FF

Hippo-on-Thames Par Eric Naulleau
Le Matricule des Anges n°32 , septembre 2000.
LMDA PDF n°32
4,00