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Domaine étranger Ô liebe Deutschland

avril 2001 | Le Matricule des Anges n°34 | par Anne Riera

Un attentat terroriste contre une base américaine. Des flics menteurs. Un faux père et sa vraie maîtresse. Beaucoup trop compliqué pour un vieux privé fatigué.

Un hiver à Mannheim

Bernhard Schlink a été découvert en France grâce à un roman, Le Liseur, vendu à plus de 87000 exemplaires. Mais cet écrivain allemand est surtout connu outre-Rhin pour ses romans policiers. Pour la seconde fois, son détective privé reprend du service à la Série Noire.
Gerhard Selb officie depuis près de quarante ans à Mannheim. Dans une vie antérieure, il fut un procureur nazi sourcilleux. Aujourd’hui, c’est un veuf sans enfant, discrètement porté sur le Sambuca et sujet à de mauvais rhumes, qui souffle en montant les escaliers. Il vit avec son chat Turbo, entretient encore une maîtresse et une poignée d’amis dont un vieux flic expert en construction en allumettes. Son intérieur est propre, il soigne ses petits-déjeuners, il a ses habitudes dans un restaurant italien et lit la très sérieuse Süddeutsche Zeitung. Selb regarde l’Allemagne comme retranché de sa réalité, ermite glabre et désabusé. Mais il arrive parfois que ses enquêtes viennent chatouiller la carapace de ses rituels immuables.
L’Allemagne de Bernhard Schlink est à l’image de nombre de nos stéréotypes français. Froide, morne et calme, avec ses autoroutes rectilignes, sa pétro-chimie et ses châteaux perdus dans les forêts de conifères. D’un ennui semble-t-il infini, avec ses ogresses blondes, « contentes et compétentes », posées derrière des chopes de bière. La face cachée de cette carte postale européenne ? Le terrorisme d’extrême-gauche, les bases militaires américaines, leurs stocks discrets de gaz mortels et le secret, aussi lourd qu’une chape de plomb, qui vient sourdement résonner aux oreilles d’un privé fatigué. Il y a beaucoup trop de monde aux trousses de la jolie punkette que Selb est chargé de retrouver. Et quand elle fait la une des journaux pour un attentat que la police n’a pas déclaré au bon endroit, l’antique bourrique décide de passer le seuil de la légalité. « J’ai trop longtemps fait mon métier. Comme soldat, comme procureur, comme détective privé, j’ai fait le boulot qu’on me demandait, et j’ai laissé les autres faire le leur. Nous sommes un peuple où chacun fait son métier, et regardez où ça nous a menés. » Le peuple allemand est-il soluble dans cette simple équation ? Qu’est-ce qu’être allemand, quand un autre fantôme de ce passé, un exilé juif, lui rétorque : « nous ne sommes pas un peuple où chacun se contente de faire son métier, malheureusement pas. » « Cela ne suffisait pas aux médecins de soigner leurs malades, ils ont aussi voulu faire de l’hygiène raciale (…) les juges ne se sont pas posé la question de savoir ce qui était juste, mais ce qui était utile au peuple et ce que le Führer désirait. »
Schlink, encore, et après tant d’autres, gratte l’imputrescible plaie. Juge et professeur de droit dans la vie civile, il sait donner la parole à toutes les parties pour mettre à jour, non seulement un pays en proie à un passé qui ne passe pas, mais une société toute entière percluse de doutes, où l’immobilisme circonspect le dispute à de violentes irruptions révolutionnaires. Selb lui-même n’en finit pas de se débattre dans un inextricable écheveau d’incertitudes. L’innocence est devenue une vertu fluctuante et parfois contradictoire. Lui reste une certitude. Individuels ou collectifs, « tous les meurtres sont commis pour sauver une existence fondée sur le mensonge. Il m’aurait fallu connaître tous les mensonges essentiels. Or ce n’était pas le cas. »

Un Hiver à Mannheim
Bernhard Schlink
Traduit de l’allemand par
Patrick Kermann
et revu par Olivier Mannoni
Gallimard - Série Noire
350 pages, 54 FF

Ô liebe Deutschland Par Anne Riera
Le Matricule des Anges n°34 , avril 2001.
LMDA PDF n°34
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