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Premiers romans L’effet antirides

mars 2002 | Le Matricule des Anges n°38 | par Éric Dussert

À l’évidence, David Foenkinos adore les incongruités. Inversion de l’idiotie place un jeune rentier face à son vide : bêtise et surmenage. Prémices d’un gagman.

David Foenkinos est un jeune homme tout en hauteur. Il arbore un air franc sur visage sympathique, il a l’oeil pétillant, le cheveu frisé, toutes caractéristiques de nature à le rajeunir en lui assurant la sympathie de la plus acariâtre des bignoles. Les éditeurs apprécient eux aussi son air juvénile et chaleureux puisque la maison Gallimard produit son premier roman, Inversion de l’idiotie, sous-titré De l’influence de deux Polonais, un livre qu’il qualifie lui-même de « léger ». On ne le contredira pas. Après avoir occupé le rôle ingrat d’attaché de presse d’un éditeur littéraire, il est passé de l’autre côté de la barrière en soumettant à l’opinion publique un premier roman si guilleret qu’il prouve que la fréquentation de la société germanopratine n’est pas parvenue à l’aigrir. D’où cette fraîcheur que l’on pourra confondre, selon le regard que l’on porte soi-même sur le monde, avec de l’idiotie -c’est lui qui l’écrit-, de la fantaisie ou un détachement teinté d’ironie. L’auteur d’Inversion de l’idiotie est un gai luron, pas tout à fait potache mais un peu gamin comme le montre sa dernière invention : le FLAP, le Front de libération des attachées de presse qui constituent, on le sait, une population singulièrement maltraitée. L’époque manque d’initiatives de ce genre.
Il émane de son roman la même impression : gentillesse et futilité, le qualificatif valant aussi pour le narrateur, un jeune rentier peu enclin à l’action rejeté par sa petite amie après huit ans de vie commune -elle n’est pas partie loin car, profitant de sa bonne poire d’ex, elle squatte une chambre de l’appartement. Afin de la reconquérir, ce « héros » de la vie vide recueille Conrad, un jeune idiot lunaire, neveu supposé de Milan Kundera qui possède la particularité bizarre d’inspirer à son entourage tendresse et amour. D’où les déchirements de fans émus (la bonne, le voisin, l’ex-copine, l’ami d’enfance, etc.) qui s’arrachent cet être bonhomme et candide sous les yeux du narrateur dépassé. Si l’on précise qu’un ripou croise dans les parages sous les traits d’un prestidigitateur, que le vieux copain se retrouve en cabane, que surgissent deux Polonais sans gêne un clin d’oeil à Gombrowicz ?-, on imagine le tableau du bazar qui aboutit à la fuite de Conrad après une « adoption d’adulte » et un jugement de garde partagé. Servi sur un ton tantôt drolatique tantôt ahuri par un narrateur toujours assis entre une interrogation métaphysique, un adage populaire, une réflexion personnelle tordue et un dilemme stupide, Inversion de l’idiotie narre donc comment l’idiot devint un génie littéraire après avoir lu Proust tandis que son « parrain » qui se croyait plutôt malin fait le constat de sa complète inadéquation au monde malgré de rares accès de lucidité : « Mes intentions me paraissaient hasardeuses ».
Les intentions du gagman David Foenkinos s’inscrivent quant à elles dans le registre du farfelu. À l’évidence, son objectif était d’obtenir un roman comique et agité. On se demande pourtant lorsqu’il badine ainsi les deux pieds dans l’incongruité si le roman était bien le genre adapté. Ses commentaires inopinés, ses à-peu-près, ses adages détournés et autres astuces démontrent qu’il a de l’esprit puis une évidence saute aux yeux : son histoire aurait fait un excellent scénario, une pièce de boulevard ébouriffante. Ses bonheurs d’expression et son allant y gagneraient même en portée. Par pudeur ou par goût de la légèreté, David Foenkinos offre des pages quelques fois excellentes où l’on devine qu’il avance masqué. La littérature française d’aujourd’hui compte assez de migraineux pour que l’arrivée d’un drille soit saluée. Mais on attend la suite.

Inversion de l’idiotie
David Foenkinos
Gallimard
211 pages, 15,50 (101,67 FF)

L’effet antirides Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°38 , mars 2002.