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Théâtre Inédits d’Est

janvier 2003 | Le Matricule des Anges n°42 | par Laurence Cazaux

La maison d’édition L’Espace d’un instant a pour mission de faire découvrir des pièces de théâtre d’Europe orientale. Ce qui la place au cœur de la nouvelle Europe à venir.

Éditeur de théâtre est souvent une activité militante. Avec les éditions L’Espace d’un instant, le militantisme est poussé à l’extrême. La structure existe depuis dix ans. Au départ l’activité est celle d’une compagnie de théâtre. Son responsable artistique, Dominique Dolmieu, se rend régulièrement en Albanie depuis plusieurs années pour travailler avec des comédiens, rencontrer des écrivains et réaliser des mises en scène. Puis il voyage dans d’autres pays de l’Europe de l’Est. Des amitiés artistiques se nouent. Et l’envie de bâtir des projets à plus long terme. Dominique Dolmieu participe ainsi à la fondation du comité albanais au sein de la Maison Antoine Vitez, le centre international de traduction théâtrale à Montpellier. Puis en 2001, la compagnie imagine une tournée théâtrale un peu folle. L’aventure regroupe sur deux mois et demi une vingtaine de compagnies de théâtre de Géorgie, d’Arménie, d’Albanie, de Serbie, du Monténégro et de France. Le principe est de passer commande de pièces courtes, de sept minutes environ, à des auteurs des Balkans. Le spectacle est la présentation de toutes ces pièces courtes jouées sur un plateau d’un mètre carré seulement. Un film ainsi qu’un recueil bilingue Petits/Petits en Europe orientale publié sous la direction de Céline Barcq et Dominique Dolmieu aux éditions Gare au Théâtre, retracent cette aventure.
La question de la création d’une maison d’édition se pose logiquement. L’équipe de L’Espace d’un instant se lance dans l’aventure il y a un an environ, en coordonnant le Pôle Balkans Caucase, chargé de la conservation, la traduction, l’édition et la promotion des écritures dramatiques d’Europe orientale. A peine ça ! Tout ceci représente un travail de titan. L’Espace d’un instant/Pôle Balkans Caucase emploie pour le moment quatre permanents, une petite équipe donc devant l’ampleur et la diversité de la tâche. D’ailleurs l’activité de création de la compagnie a pour l’instant tendance à pâtir de l’engagement militant nécessaire pour faire naître ce Pôle Balkans Caucase. Souhaitons que la tendance s’inverse rapidement.
Pour l’activité de conservation, une bibliothèque est constituée. Elle regroupe environ 700 œuvres dramatiques écrites dans une langue d’Europe orientale. Ce fonds est à la disposition du public. Une base de données sera prochainement disponible sur le site internet de la compagnie.
Six pièces ont déjà été publiées. Elles sont tirées à 500 exemplaires chacune et diffusées de manière artisanale dans les librairies théâtrales, les bibliothèques spécialisées dans les études slaves… Pour que ces publications voient le jour, une quinzaine de comités de traductions a été créée, un pour chaque langue : albanaise, arménienne, azérie, bosniaque, bulgare, croate, géorgienne, grecque, kurde, macédonienne, roumaine, romanie, serbe, slovène, turque et du Caucase du Nord.
Les quatre dernières parutions viennent de sortir cet automne. Quatre textes très tourmentés, souvent traversés par la douleur et la mort. Plusieurs portent les stigmates de la guerre. Les dramaturges sont pour la plupart marqués dans leur chair par l’histoire de leur pays. Leur théâtre est très engagé contre les violences et les oppressions.
Ainsi Moussa Akhmadov est né en 1956 en déportation. Réfugié dans une république voisine de Tchétchénie, il dirige aujourd’hui le centre Culturel tchétchène de l’exil. Avec Les Loups, il raconte comment en 1944, sur ordre de Staline, l’Union soviétique organise la déportation du peuple tchétchène vers la Sibérie et l’Asie centrale, provoquant la mort de la moitié d’entre eux. Pour Moussa Akhmadov raconter ce fait historique est une façon de dénoncer les exactions commises actuellement par la Russie sur son peuple. Les Loups est une œuvre dévastatrice qui montre une entreprise de déshumanisation dans la même lignée des Pièces de guerre d’Edward Bond.
Dans La Dépouille du serpent, Azra victime d’un viol collectif, se mure dans le silence, haïssant ce serpent qu’elle porte dans son ventre. Elle retrouve seulement la parole dans l’imaginaire. Slobodan Snajder, auteur croate né en 1948 à Zagreb a longtemps été une « star » en ex-Yougoslavie jusqu’à l’arrivée de Tudjman qui le pousse à l’exil. Il est aujourd’hui directeur du Théâtre de la jeunesse à Zagreb. La Dépouille du serpent a été représentée dans de nombreux pays européens, mais elle restait encore mal connue en France. Cette traduction est l’occasion de découvrir un grand dramaturge croate.
Dans Erigon, Jordan Plevnes (ambassadeur depuis 2001 de Macédoine à Paris et auprès de l’Unesco) s’inspire d’un fait historique : la déportation de milliers d’enfants macédoniens en 1949, par les soldats de l’Armée rouge. La pièce, très étrange, proche du fantastique est une farce macabre. Elle met en jeu Issidore, un comédien de la Macédoine antique et son chien Erigon qui est en fait son âme. Erigon mort finira marié avec Mme Smrt, propriétaire de l’Institut de lavage des morts. Des loups, des chiens, des serpents, l’homme semble ne plus avoir de place dans des sociétés dévastées par la violence.
Saviana Stanescu est née en Roumanie en 1967. Elle s’impose vite comme une dramaturge très novatrice, ses textes sont joués au Royal Court Theatre de Londres ou au théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis. Compte à rebours met en scène un personnage féminin très fort, Zozo, une jeune fille à la dérive dans une société mortifère. Zozo nous surprend par sa violence, son pathétique, sa folie. L’écriture de Saviana Stanescu est très nerveuse, provocatrice, elle brouille les repères de la morale et la bienséance avec humour, mais un humour plutôt noir.
Un voyage vers l’Est tourmenté et sombre mais où la parole théâtrale retrouve une fonction nécessaire et vitale.

La Dépouille du serpent
Slobodan Snajder
Traduit du croate par M. Robin
118 pages, 10
Compte à rebours
Saviana Stanescu
Traduit du roumain
par Mirella Patureau
44 pages, 8
Erigon
Jordan Plevnes
76 pages, 10
Les Loups
Moussa Akhmadov
Traduit du tchétchène par
A. Abaïev et C. Sirota
92 pages, 10

* L’Espace d’un instant - 19, passage Fréquel 75020 Paris. Site internet : sildav.org

Inédits d’Est Par Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°42 , janvier 2003.
LMDA PDF n°42
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