À l’instar d’un Pedro Almodovar, et c’est sans doute le seul point commun de leurs univers, Findley semble connaître parfaitement la psychologie féminine. Il possède en tout cas le don de construire un texte qui sonne si juste qu’on pourrait croire ce dernier écrit par une femme. Avec Les Robes bleues, Timothy Findley, décédé l’année dernière, referme un cycle d’écriture composé de onze romans (dont huit sont traduits en français). Si dans quelques-uns de ses textes, Le Chasseur de têtes et Pilgrim entre autres, le trouble mental amène le récit à déborder vers le territoire fantastique, une autre part de son œuvre demeure bien plus intimiste, parfois à la limite du « sentimental ». Les Robes bleues appartient à ce second courant.
En compositeur subtil, le Canadien met en place ici une grappe de personnages évoluant autour d’un couple à la dérive ; ils sont autant d’échos à la détresse conjugale occupant le centre du récit. Chapitres courts et très visuels, nombreux dialogues, la voix du Canadien porte le lecteur, même si Findley a déjà foré beaucoup plus profond dans l’exploration de la folie. On suit la dérive de Jane et Griffin, couple vivant à la fin des années 90 à Stratford-sur-Avon, ville de l’Ontario où se déroule tout au long de l’année un grand festival de théâtre. Griffin, acteur, est prêt à tout pour obtenir les rôles qu’il convoite…
Les Robes bleues semble parfois atteint d’une sorte de « dérive hollywoodienne » qui risquerait, si elle contaminait l’ensemble du texte, d’invalider la totalité du roman. Heureusement, Timothy Findley parvient à préserver de belles poches de doutes et des fractures qui permettent de ne jamais franchir cette dangereuse limite.
Les Robes bleues
Timothy Findley
Traduit de l’anglais (Canada)
par Sylviane Lamoine
Le Serpent à plumes
420 pages, 22 €
Domaine étranger Corps à prendre
mars 2003 | Le Matricule des Anges n°43
| par
Benoît Broyart
Un livre
Corps à prendre
Par
Benoît Broyart
Le Matricule des Anges n°43
, mars 2003.