Tempête d’ombre et de lumière à la confluence de la mystique et de l’érotisme, ode à la toute-puissance magnétique de la femme, le dernier livre de Claude Louis-Combet, tout en errances et rêveries, fantasmagories et théâtralité anatomique, a le luxe magnifiquement scandaleux de tout ce qui vient de l’autre côté. De l’envers de l’excès, de ces régions très obscures de l’imaginaire et de l’inconscient où s’éprouve très viscéralement le lien qui existe entre Dieu et le sexe, « comme si l’âme formait l’extrême floraison du sexe ». C’est cette face cachée du spirituel, cette intériorité sensuelle où âme corps et rêve ne font qu’un, qu’explore, dénude, épouse un Claude Louis-Combet au sommet de son art. Car « aujourd’hui où les convictions de la foi religieuse paraissent hors d’atteinte du ridicule et où l’on peut tout dire puisque personne ne croit plus à rien, il ne faut pas se retenir de révéler le nœud de conduites aberrantes, qui se dissimule derrière la façade bienséante de la sainteté officielle ». Définitivement en mal de Dieu mais toujours en mal d’adoration, il n’en finit pas de mesurer à l’aune de sa propre expérience (lui qui, à 18 ans, et au prix d’une rupture radicale avec toutes les promesses du cœur et des sens, s’était retiré du cours de la vie ordinaire pour entrer en religion avant d’y renoncer, trois ans plus tard, au moment de prononcer ses vœux) ce qu’il en coûte d’être un fils perdu, un homme condamné à vivre avec sa nostalgie du sacré, ses angoisses de perdition et son rêve d’un monde sans péché. Écrivain engagé dans l’expression de la dimension érotique de l’existence, il utilise, sans en être dupe, toutes les puissances de la littérature pour évoquer des trajectoires bouleversantes, des transgressions spectaculaires, des amantes aussi fascinantes qu’auto-destructrices, des êtres engageant totalement leur corps dans la quête de la perfection, de l’absolu ou de l’amour de Dieu ce qui est sa manière de poursuivre son interminable interrogation sur les liens obscurs liant la Beauté au Mal, ou sur le sens de l’éros qu’il faudrait peut-être considéré comme l’âme de l’univers ?
Autant dire que Les Errances Druon, avec sa Vierge qui saigne et son fond d’amours sacrilèges ou interdites, se situe aux antipodes de ce qui se pense et se dit aujourd’hui. S’inspirant d’une figure populaire du folklore religieux du Nord de la France, saint Druon, patron des bergers, Claude Louis-Combet fait de ce personnage mi-historique mi-légendaire qui vécut au début du XIIe siècle, une sorte d’alter ego, un personnage qui tantôt lui ressemble comme un frère, tantôt lui est complètement étranger.
Ce qu’il met en lumière porte à l’incandescence ce nœud d’innocence et de perversité où s’enracine tout amour.
Cette façon de réinventer sa biographie intime, et tout intérieure, dans le miroir de fantasmes et d’expériences exemplaires partagées avec le héros du récit, Claude Louis-Combet la nomme mythobiographie. Ce qui suppose un...
Événement & Grand Fonds Divin corps
Déjà à la tête d’une des œuvres les plus marquantes de la fin du XXe siècle, Claude Louis-Combet nous offre avec les tribulations de Druon un saint chez qui la vision transcende la possession, un extraordinaire bouquet de sublimités mystico-charnelles.