Agathe raconte son glissement vers l’introversion puis l’aphasie et comment elle devient le souffre-douleur de Nicolas, son camarade de classe. Le roman alterne entre l’univers familial et l’école, les deux lots quotidiens de la jeune adolescente en souffrance. Deux mondes sclérosés et oppressants qui ne semblent offrir à la jeune fille aucune échappatoire possible. Agathe décrit d’un côté sa mère, nœud gordien dans l’histoire, qui nourrit sa névrose et la donne en pâture à sa fille et à son mari impuissant, entretenant la douleur d’un lourd secret de famille (la perte de son premier enfant, Augustin) qui explose un jour à la figure d’Agathe, et de l’autre, Nicolas, véritable tête à claques, qui s’est juré de la faire parler un jour.
Dans ce roman, les mots ne portent plus rien que la haine des autres. Agathe, elle, choisit l’effacement en devenant silencieuse. Un silence paradoxal puisque le texte est riche de ses mots enfermés au-dedans d’elle-même. Alors que tout semble noué (Agathe frôle la schizophrénie en se prenant pour Augustin pensant ainsi s’aguerrir pour affronter le monde extérieur), l’annonce de l’hospitalisation de son pire ennemi va avoir un effet cathartique sur la jeune fille. Elle décide d’aller lui rendre une visite amicale. Une scène emblématique représente cet instant où tout bascule : elle se regarde dans le miroir de l’ascenseur qui la mène à Nicolas. Son regard s’ouvre sur le réel, le présent. Elle prend conscience d’elle-même, apprend à se défaire des angoisses maternelles. L’écriture simple et fluide de Nathalie Kuperman maintient une distance nécessaire pour ne jamais verser dans le mélodrame.
Pas un mot de Nathalie Kuperman
L’École des loisirs, « Neuf », 8 €
Jeunesse Un bienfait n’est jamais perdu
septembre 2006 | Le Matricule des Anges n°76
| par
Malika Person
Un livre
Un bienfait n’est jamais perdu
Par
Malika Person
Le Matricule des Anges n°76
, septembre 2006.