La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Domaine étranger La haine en voisinage

mai 2007 | Le Matricule des Anges n°83 | par Lucie Clair

Les jeunes années d’un pays strié de rêves inassouvis et de désirs de vengeance la Mozambicaine Lilia Momplé rassemble les éclats d’un destin collectif en devenir.

Lorsque le Mozambique accède à l’indépendance en 1975 quelques mois à peine après la révolution des Œillets, le pays est en guerre civile depuis dix ans. Mais l’éviction du Portugal ne signe pas pour autant son accession à la paix. C’est le début d’une autre lutte, plus insidieuse une guerre de l’ombre qui durera quinze ans, fera plus d’un million de morts et des millions de déplacés, celle menée par « l’apartheid qui savait si bien tirer parti des faiblesses humaines, des tares, des passions, des angoisses et des insécurités. » Base arrière de l’ANC, organisation de lutte contre l’apartheid sud-africain, le Mozambique dirigé par le FRELIMO parti marxiste-léniniste proche de l’URSS devient, à l’instar des pays limitrophes, le théâtre des opérations de représailles et de déstabilisation de Pretoria. Qu’elle soutienne la RENAMO (Résistance Nationale Mozambicaine) ou qu’elle commette des attentats directement sur le territoire mozambicain, l’Afrique du Sud secondée par la Rhodésie, future Zimbabwe est ce voisin menaçant que Lilia Momplé compare à une griffe « recourbée et envahissante » aperçue sur une toile de la peintre Catarina Temporario. Le nom du tableau donnera son titre au roman Neighbours pour dessiner le parcours d’une nuit à Maputo réunissant le destin de trois foyers dans un meurtre aux motifs politiques et manipulateurs.
De 19 h à 8 h du matin, chaque personnage apparaît tel une figure de l’Histoire et des soubresauts du Mozambique, chacun aux prises avec ses démons et son passé. Si pour le Mauricien Dupont, le moteur de l’action meurtrière réside dans les particularismes ethniques d’un pays où métis, Indiens, noirs constituent des castes occultes entravant l’ascension sociale le Portugal avait trié sur le volet les noirs « assimilados » qui pouvaient avoir accès à la scolarisation la revanche pour sa femme Ména trop noire pour rassembler les suffrages de sa belle-famille, trop docile pour penser à s’insurger contre les coups ouvre la voie à une existence insoupçonnée. Femme trompée, Narguiss a subi « les humiliantes démonstrations de condescendance réservées aux femmes rejetées », et prépare la fête de l’Aïd en ressassant les disparités du développement entre le Nord et le Sud, et les difficultés à « faire main basse » sur un mari pour ses trois filles abandonnées par leur père. Survivants des campagnes traversées de massacres quotidiens perpétrés par des enfants de 12 ans le Mozambique était connu pour sa politique de formation d’escouades d’enfants-soldats dans les années 1980 Januario, Zaliua et Romu découvrent le portugais en arrivant à la ville (au Mozambique l’analphabétisme touche encore aujourd’hui 68% des hommes et 36% des femmes), et, en adoptant l’une des deux seules stratégies accessibles : domestique ou soldat, inscrivent leur destin dans l’équilibre incertain de ces premiers temps de l’indépendance, où le monde « avançait et reculait en même temps », où les espoirs cohabitaient avec racisme et haines stupéfaites.
Publié en 1995 pour sa version portugaise soit trois ans après les accords de paix écrit avec vivacité et précision, Neighbours premier ouvrage de Lilia Momplé traduit en français est le travail d’un écrivain éprise de tolérance et attentive aux « catastrophes naturelles et artificielles qui ruinent le pays ». En proposant avec pudeur un portrait fidèle des enjeux de survie pour une population dont plus de la moitié vit encore sous le seuil de pauvreté, et un éclairage chaleureux sur la condition des femmes dans un pays qui s’est doté depuis 2004 d’un chef de gouvernement féminin, elle retrace les espaces libres du désir qui peuvent aider à les surmonter. Ex-militante indépendantiste, Lilia Momplé fut secrétaire d’État à la culture, avant d’occuper aujourd’hui le poste de directrice du Fond pour le développement artistique et culturel du Mozambique. Preuve que l’on peut être femme politique et écrivain de talent.

Neighbours de Lilia Momplé, traduit du Portugais (Mozambique) par Paula Salnot et Inô Riou, Les Allusifs, 172 p., 16

La haine en voisinage Par Lucie Clair
Le Matricule des Anges n°83 , mai 2007.
LMDA papier n°83
6,50 
LMDA PDF n°83
4,00