Lignes N°22 (Philippe Lacoue-Labarthe)
Grâce à l’aide de ses lecteurs, Lignes et ses nouvelles éditions redémarrent seules et totalement indépendantes (les premiers titres paraîtront en septembre). Ce choix courageux coïncide avec un hommage rendu à Philippe Lacoue-Labarthe, décédé en début d’année, dont l’intransigeance éthique et politique jouxte la raison critique que cherche à maintenir Lignes. Le volume réunit une trentaine d’auteurs, de son ami et complice Jean-Luc Nancy à son traducteur italien Federico Nicolao, à Genette, qui évoque son brillant élève au lycée du Mans, ou à l’acteur Philippe Morier-Genoud qui met en perspective la relation de Lacoue-Labarthe au théâtre. Cet ensemble est le premier éclairage de fond sur une œuvre ouverte, travaillée sourdement par la philosophie et la poésie, sur la question de la mort, du tragique. Au centre de ses travaux, la mise à nu de l’échafaudage idéologique que créa Heidegger dans son commentaire des Hymnes de Hölderlin, lequel y énonce une poésie dont l’essence serait celle d’un peuple (allemand). Mais cette part critique recoupe aussi son travail d’écriture, sa réflexion sur Lacan, son travail de traducteur (Benjamin, Nietzsche, Freud, Caproni). Philippe Lacoue-Labarthe interrogea sans discontinuité ce qui distingue la création de l’ordre des discours, ce dont témoignent aussi les quelques inédits publiés. Le théâtre, via une réflexion sur le tragique grec, la musique (dont le jazz), et l’écho que ces domaines de prédilection trouvèrent dans les œuvres qu’il affectionnait (Pasolini, Kafka, Beckett, Laporte, etc.) sont abordés ici comme des ensembles poreux et pensés comme une politique de la résistance.
Lignes N°22, 258 pages, 20 € (distribution/diffusion Belles Lettres)