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Poésie Cendres et rosée

juin 2007 | Le Matricule des Anges n°84 | par Richard Blin

Le relief, le grain, la luminosité de la beauté comme de l’adversité : l’étrange modernité d’un poète de l’époque Tang, mort à 27 ans, il y a douze siècles.

Quand on naît à la fin d’un siècle qui vit la poésie chinoise atteindre ses plus hauts sommets, avec Wang Wei (701-761), Li Bai (701-762) et Du Fu (712-770), il est difficile de se faire un nom. Quand, de plus, on n’a que 243 poèmes à opposer aux milliers des autres, on comprend que Li He (791-817) soit resté, jusqu’à une date récente, ignoré en Occident. C’est aussi que sa vie fut courte et son destin tragique. Tout avait pourtant commencé sous les meilleurs auspices, pour ce descendant d’un prince de la maison impériale, à qui l’écriture de ses Lunes avait donné le droit de se présenter au concours de « lettré avancé », un titre donnant accès aux plus hautes charges. Hélas, dans cette société incroyablement hiérarchisée, codifiée, fonctionnarisée, il se vit interdire l’accès aux épreuves au nom d’un tabou onomastique, l’un des caractères du nom de son père figurant dans l’intitulé du concours… Nous sommes en 810 et le voici donc exclu à vie du mandarinat. Finis les espoirs de grande carrière. À peine bénéficiera-t-il de l’aumône d’un poste d’huissier insuffisant pour le nourrir. Il démissionnera au bout de trois ans et regagnera son village natal, ce dont témoignent les « Treize poèmes de mon jardin au sud ». Mais ayant trouvé une place dans l’état-major d’un général luttant contre des rebelles, il repart. « Après les palais, puis le petit jardin, les arrières d’une armée », résume Guy Degen, dans sa préface, avant d’ajouter qu’ « en moins de trois ans, dans cette garnison de Luzhou où il se partage entre la poésie, les beuveries et les femmes, il aide sa phtisie à l’achever ». Il reviendra mourir là où il est né, à 27 ans. C’est de ce parcours, de ses malheurs, que naissent ses poèmes. Véritables reflets de ce qu’il vit, ils relèvent d’abord du monde dont il rêve, fait d’atmosphères de palais et de fêtes galantes. On mange des « lèvres de gibbon », les chemins sentent la cannelle ou la fleur de grenadier et les filles sont belles. Mais la dure réalité aidant, c’est bientôt l’amertume de l’ambitieux frustré et le nécessaire « travail du deuil » qui vont prévaloir, le conduisant à une sagesse résignée. « Sous le taillis, on s’ouvre à l’aube un chemin./ Hautes herbes denses, trempées par le brouillard de la nuit./ Les chatons des saules alarment la rive encore enneigée,/ Et la pluie à blé noie les champs le long de la rivière./ Du vieux temple la cloche tinte, dans le lointain, par instants./ Là-bas, où une crête l’ébrèche, la lune reste suspendue./ Sur la langue de sable, on bat le briquet./ Un lumignon de bambou éclaire la barque du pêcheur. »
Déclassé, silhouette squelettique et cheveux blancs, Li He a la mélancolie méditative, mais trouve dans la contemplation de la nature, une consolation. Des paysages, il sait saisir, en d’étonnants raccourcis, les lignes de force qui le font ressembler à sa propre vie. Le poème est en résonance, en dialogue, en affection, même, avec le paysage ou les éléments. Il y a correspondance entre ses émotions et ce qu’il contemple, comme entre son destin et celui de tous les disgraciés, célèbres ou anonymes. Fraternité d’âmes souffrantes que le poème noue à une saison, un lieu ou un champ de bataille.
Face aux choses, à l’instant « la cendre est tiède encore du bâton de parfum parti en fumée », Li He ne garde que la réaction de sa conscience dont le poème enregistre les oscillations ou l’ondoiement. « Voici que la lune passe sous l’avancée du toit. Le vent se charge de rosée./ C’est l’aube, et c’est bien là ma cour, solitaire et toute raboteuse !/ Qui pourrait supporter cette raideur et ce vide ?/ De ma couche, je prête l’oreille aux sanglots du criquet. » Restent le vin, l’hédonisme du Carpe diem. Reste surtout son sens de l’image, comme cette lune qui « scelle les heurtoirs » d’un palais déserté et « en polit amoureusement l’éclat ». Une parole venue de loin mais dont le ton et la beauté méritent tout notre intérêt.

Le Triomphe
de l’amour

Geoffrey Hill
Traduit de l’anglais
par René Gallet
en collaboration
avec Michael Edwards
Édition bilingue
Cheyne éditeur,
« D’une voix l’autre »
170 pages, 20

Cendres et rosée Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°84 , juin 2007.
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