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Domaine étranger La rage au ventre

juillet 2007 | Le Matricule des Anges n°85 | par Delphine Descaves

Poète, romancier et critique, Patrick Kavanagh (1904-1967) nous livre, dans une prose sans complaisance, ses réflexions sur l’Irlande littéraire.

Vaincu par l’amour

Vaincu par l’amour est un recueil de textes autobiographiques et critiques, écrits de 1936 à 1964. Issu d’un modeste milieu rural, fils de petit cordonnier, Patrick Kavanagh a toute sa vie porté aux nues la figure du poète. Àgé d’une trentaine d’années il a cherché à intégrer le milieu littéraire de Dublin, tout en restant marginal. Peu soucieux des convenances, il n’a cependant pas échappé à une certaine ambiguïté, entre désir de reconnaissance et dédain virulent à l’égard des écrivains de son temps. En effet, Kavanagh réserve ses observations les plus acerbes à ces derniers, dont il fustige l’insincérité des écrits. À ses yeux la majorité des romanciers et poètes peignent une Irlande frelatée, artificielle, et, sous prétexte d’être proches de la terre, divulguent une imagerie paysanne très éloignée de la réalité. Lui, Kavanagh, quand il parle de la terre d’Irlande, le fait avec nostalgie, sans que ne le quitte pourtant un prosaïsme rugueux. Cette campagne, il l’a bien connue et il sait évoquer ces « gens simples » présentés souvent de façon idéalisée par ses pairs, et sur lesquels il ne se prive pas d’ironiser : « Non, ce qui caractérise les gens simples, c’est que justement ils sont rustauds, familiers. Ils vous piétinent l’âme sans sourciller. Les seuls « gens simples » qui soient supportables sont ceux que nous avons fabriqués de toutes pièces avec nos souvenirs et notre puissance d’évocation. »
Ce sont là peut-être ses meilleurs textes, qui légitiment sa position de contempteur de l’« irlandité » que Kavanagh déteste, ce qui l’intéresse dans l’écriture c’est la recherche de l’universel devenue véritable fonds de commerce littéraire. L’auteur de Tarry Flynn n’hésite d’ailleurs pas non plus à écorner les plus prestigieux auteurs, comme Synge, Joyce ou encore Yeats : « (Il) a choisi de faire de l’Irlande son mythe et son sujet. Et aujourd’hui il est là, debout, au centre de son mythe, mal à l’aise, à l’idée qu’il n’en fait pas vraiment partie (…) En vérité Yeats n’appartenait nullement au comté de Sligo, et le comté de Sligo n’est pas le « pays de Yeats » comme se plaisent à le dire les syndicats d’initiative. Le pays de Yeats, c’est bien plutôt Londres, c’est le Rymer’s Club, les préaraphaélites… » L’obsession de Kavanagh est la recherche de l’authenticité, et il débusque inlassablement les clichés que relaie complaisamment la littérature nationale. Aujourd’hui encore, ce qu’il dit de la médiocrité des productions culturelles résonne aussi pour nous : « Toutes ces émissions artisitiques, ce n’est jamais que du commerce. C’est du toc, ça ne sert qu’à tromper le public, c’est le violoneux qui joue pendant que son comparse vous fait les poches. Le plus grand bien que nous ayons, c’est la vie. Mais ce ramassis de médiocres et de lâches ne veut pas de la vie ; tout ce qu’ils veulent c’est convaincre de ce mensonge : que leur monde dérisoire est le meilleur des mondes possibles ». Or justement le poète doit être capable d’écrire sur la vie et pas sur ses représentations mille fois rebattues : « Un ami d’autrefois m’a dit un jour que j’écrivais trop sur les patates et sur les choux et pas assez sur les roses, j’imagine ? Mais permettez-moi de poser une question : qu’est-ce que la beauté, dans l’art, ou dans la nature ? On peut dire que c’est ce qui se passe quand on regarde quelque chose. Et regarder un chou, cela peut être bien plus troublant que regarder une rose : toute beauté est énergie. »
Soucieux d’approcher une vérité de la vie et de l’homme, Kavanagh accorde de l’importance à ses manifestations infimes, les plus propres selon lui à reproduire fidèlement ce qui est : « ce qui paraît revêtir sur le moment une importance publique n’est jamais important. Les poètes et les artistes peu intelligents pensent qu’en traitant un sujet d’envergure publique ils assurent à leur œuvre une certaine postérité. Eh bien non, rien de plus inintéressant, de plus vilipendé que ce qui est « important ». Les choses qui comptent vraiment sont les détails insignifiants, dont on aurait honte de parler en public. »

Delphine Descaves

Vaincu par l’amour
Patrick Kavanagh
Traduit de l’anglais par Béatrice Dunner
Anatolia, 446 pages, 24

La rage au ventre Par Delphine Descaves
Le Matricule des Anges n°85 , juillet 2007.
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