On aurait pu crier à l’hérésie, croire au sabordage programmé. C’est que l’Atelier In8 trouve sa raison d’être dans la nouvelle. Elle lui a voué son âme dans un pays qui a la fâcheuse réputation de rester insensible à ses charmes. Créée en 1999, l’entreprise puise l’inspiration jusqu’à trouver son nom dans le format « in octavo », où la feuille imprimée est pliée trois fois afin d’obtenir huit feuillets. Aux commencements, elle était à la base orientée vers le graphisme avant de faire du sacerdoce éditorial une activité à plein temps à partir de 2005. Le catalogue, lui, s’est étoffé au fil des jours. Après les irréductibles de la première heure (Olivier Deck, Bernard Manciet, Claude Chambard), l’Atelier s’offre le luxe de quelques belles découvertes. On pourrait ainsi parler des Temps filiaux de Marie Cosnay ou de Jérôme Lafargue, dont on connaît l’heureuse fortune chez Quidam aujourd’hui. Des livres restant fidèles à une exigence qui pourrait être la pierre angulaire de cette aventure humaine. En à peine un quinquennat, l’éditeur peut s’enorgueillir d’environ quatre-vingt-dix titres à son catalogue - dont un peu plus de la moitié est constituée des nouvelles qui ont fini par faire sa réputation auprès des libraires et des lecteurs les plus fidèles. Aujourd’hui, la maison change de mode de diffusion et se professionnalise en s’assurant les services de Pollen. L’éditeur indépendant sera ainsi présent dans la France entière, en Belgique et au Canada dès le mois de septembre.
Voilà autant de raisons de nous faire arpenter les terres du Béarn, dans un petit village situé à quelques encablures de Pau, pour partir à la rencontre de l’équipe. L’Atelier In8, c’est Olivier Bois, le chef d’entreprise qui s’occupe des choix stratégiques et fait tourner la boutique. Il y a aussi Sylvie Lemaire, ancienne libraire, et Isabelle Roy, jadis chez Actes Sud. C’est sur la diversité de ces trajectoires que s’est fondée la maison, dont la direction éditoriale est confiée à Josée Guellil. Cette dernière esquisse les grandes orientations de l’Atelier, à distance du battage médiatique et de la pertinence par la nouveauté : « Un libraire qui aime le livre est un libraire qui vend mieux, alors autant travailler sur un fonds qu’il adore plutôt que sur un titre récent qu’il aime moins. » Un discours atypique qui revendique la révocation d’une vision de la littérature ancrée dans la consommation à tout prix. Portrait d’un éditeur en coureur de fond.
Josée Guellil, dans quelles conditions s’est créée la maison d’édition ? Le catalogue s’ouvre en 2005 mais l’historique de l’Atelier In8 remonte à 1999…
Au début, nous n’étions qu’un atelier graphique. Le but était d’assurer une trésorerie et d’avoir les reins solides. Mais le premier livre à proprement parler date de 2003. Il s’agissait d’un texte inédit de Bernard Manciet, écrit directement en français contrairement au reste de ses textes où l’auteur privilégie l’occitan. Le livre s’intitule La...
Éditeur Court-circuit
février 2010 | Le Matricule des Anges n°110
| par
Benoît Legemble
Depuis cinq ans, une petite maison béarnaise joue les agitatrices de talents au service de la nouvelle et des formes courtes de narration. En marge de l’actualité et des canons consacrés de la littérature.
Un éditeur