Pour atteindre les confins du système solaire, il faut compter quatre années-lumière. Pour l’étoile la plus proche, quatre heures-lumière. Océan infini de vide. Mais sommes-nous vraiment sûrs qu’il existe un vide ? La seule chose que nous sachions, c’est que dans cet espace, il n’y a pas d’étoiles lumineuses. Mais pourrions-nous seulement les voir si jamais elles existaient ? Et s’il existait des corps non-lumineux ? Des corps sombres ? Serait-il impensable que l’on ait sur les cartes célestes (tout comme sur les cartes terrestres), représenté les cités-étoiles en oubliant les villages-étoiles ? (…)
Comme me l’a dit Saint-Just dans un rêve que j’ai fait il y a quelque temps : même les têtes des aristocrates peuvent nous servir d’armes.
Le projet de l’infrarréalisme pour le monde est un indigénisme : un indien fou et timide.
Il existe un nouveau lyrisme en Amérique latine, qui ne cesse de croître et de se soutenir d’une manière qui ne cesse pas de nous étonner. L’entrée en matière y est déjà une entrée en aventure. Le poème un voyage et le poète, un héros dévoilant d’autres héros. La tendresse, un exercice de vitesse. Respiration et chaleur. Une fois l’expérience déclenchée, les structures se dévorent entre elles. Les contradictions s’accentuent jusqu’à la folie.
Les temps sont durs pour la poésie, disent certains en sirotant leur thé, en écoutant de la musique dans leurs appartements, en parlant (et en écoutant) les vieux maîtres.
Les temps sont durs pour l’homme, disons-nous, tandis que nous choisissons de retourner sur la barricade après une journée pleine de merde et de gaz lacrymogène, quand nous créons et découvrons de la musique jusqu’au fond des provinces, quand nous regardons longuement ces cimetières-qui-toujours-s’étendent, où les vieux maîtres boivent une tasse de thé avec leur désespoir, ou s’enivrent de rage pure, ou d’inertie. (…)
La vraie imagination est celle qui dynamite, élucide, injecte dans les autres imaginations ses microbes émeraude. (…) Les saisons subjectives de l’être humain, avec leurs beaux grands arbres obscènes, doivent être prises comme des laboratoires d’expérimentation. Il faut entrevoir, il faut fixer des situations parallèles et déchirantes comme une grande balafre sur la poitrine, et sur le visage. (…)
Le risque est toujours ailleurs. Le vrai poète est celui qui toujours s’abandonne. Il ne reste jamais trop longtemps au même endroit. Comme les guérilleros, comme les ovnis. Comme les yeux des prisonniers condamnés à perpétuité. (…)
Faire apparaître de nouvelles sensations. Subvertir la quotidienneté.
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Roberto Bolaño, Mexique,...
Dossier
Roberto Bolaño
Lâchez tout, à nouveau
mars 2011 | Le Matricule des Anges n°121
(Extraits du Premier manifeste du mouvement infrarréaliste)