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Domaine français Enfer nucléaire

avril 2015 | Le Matricule des Anges n°162 | par Anthony Dufraisse

À la fin des années 70, Jean-Pierre Andrevon imaginait un cataclysme « de grande envergure ». Saisissant.

Pourquoi « Dyschroniques » ? Parce que le propre de cette collection est de superposer les époques. Philippe Lécuyer, qui la dirige : « elle exhume des nouvelles de science-fiction ou d’anticipation, empruntées aux grands noms comme aux petits maîtres du genre, tous unis par une même attention à leur propre temps, un même génie visionnaire et un imaginaire sans limites ». Une bonne quinzaine de textes, tous initialement écrits entre 1940 et 1980, ont déjà paru, le dernier en date étant cette longue nouvelle de Jean-Pierre Andrevon, Les Retombées, tirée d’un recueil – Dans les décors truqués – sorti à l’origine en 1979.
Le texte s’ouvre sur une scène proprement pétrifiante. Accident ou guerre nucléaire, allez savoir, toujours est-il que les survivants d’un malheur trop démesuré pour être immédiatement appréhendé, se retrouvent « précipités dans l’incroyable ». En enfer, quoi. Après une déflagration sans équivalent, les voilà qui errent, « fantômes toussotants », « épouvantails sur champ d’apocalypse », avant d’être pris en charge – ou au piège, c’est toute l’ambiguïté subtile du texte – par les militaires. En prenant comme point de départ une explosion en France qui a tout de la catastrophe nucléaire, on pouvait penser que Andrevon poursuivrait son récit dans une veine essentiellement apocalyptique, avec, possiblement, la tentation d’en faire trop dans, disons, une sorte de lyrisme du désastre. Cette chronique de la terreur nucléaire évite la surenchère en prenant un tour autrement plus intimiste. L’écrivain se concentre plutôt sur les projections imaginaires des personnages, à commencer par François, qui ressassent et tentent d’interroger leur nouvelle condition. Sans jamais verser dans le psychologisme, il s’en tient donc à leurs ressentis, à leurs perceptions. Poids des regards, des attentes, des stupeurs. Quand on a tout perdu, qu’on a le sentiment que sa présence au monde est arbitraire, on est livré aux émotions à l’état brut. Le courage, l’abattement, la colère alterneront durant ce voyage émotionnel face au silence – volontaire ou contraint ? – des autorités. La narration très descriptive qui encombre parfois certains récits braqués sur l’avenir, est ici réduite à l’extrême. Peu friand, on l’a dit, d’effets spectaculaires, Andrevon fouille l’intérieur de ceux qui sont au cœur de la « tourmente ». Au terme de cette nouvelle à l’atmosphère carcérale, le lecteur, à la suite des personnages, aura, par mimétisme, goûté à la peur, à la panique et à ce trouble perpétuel qu’entraîne la perte totale de repères. Ce n’est évidemment pas un hasard si Andrevon s’est attaqué à un tel thème. Dès les années 70, son engagement au sein de la mouvance écologiste l’amène à militer contre le nucléaire, notamment au sein de La Gueule ouverte, un des premiers mensuels écolos sous-titré « le journal qui annonce la fin du monde ». C’est sur cette toile de fond anxiogène (opposition à la cons-truction de centrales en France, accident de Three Mile Island…), que le projet littéraire d’Andrevon s’inscrit d’abord. On sent cette dimension écologique dans une réflexion en pointillé sur la disparition du paysage, l’auteur s’attardant régulièrement sur ce qu’on pourrait appeler une esthétique du ravage et de la liquéfaction : « Le panorama était empreint d’une sorte de tristesse grandiose mais sereine, et François lui trouva la beauté suspecte mais réelle des cataclysmes de grande envergure ».
Indiquons pour finir que la reparution de cette nouvelle est assortie d’un concours d’écriture* dont Andrevon en personne est le parrain. Bonne idée que celle de l’auteur et de l’éditeur d’inviter les lecteurs à donner une suite aux Retombées. Ici comme là, les mêmes thèmes doivent être abordés : terreur nucléaire, manipulation militaro-industrielle, mensonge d’État, contrôle politique. Avis à ceux qui veulent plancher et faire crépiter le compteur Geiger.

Anthony Dufraisse

* lepassagerclandestin.fr/zoom/concours-de criture.html

Les Retombées
Jean-Pierre Andrevon
Le Passager clandestin, « Dyschroniques »,
114 pages, 7

Enfer nucléaire Par Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°162 , avril 2015.
LMDA papier n°162
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