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Égarés, oubliés Et maintenant, l’oncle !

février 2019 | Le Matricule des Anges n°200 | par Éric Dussert

Si Louis Chadourne II fait un peu d’ombre à son frère Marc Chadourne III, le Chadourne I a complètement disparu des radars. La littérature comme histoire familiale…

On en connaissait deux, voici le troisième : André. Jusqu’à présent, les Chadourne qui s’étaient adonnés à la littérature il y avait Louis, le chouchou, petit maître de première importance, auteur d’un magnifique Pot-au-noir (1922), du Maître du navire (1919), d’un journal, de poèmes, mort d’un grave dérèglement nerveux provoqué par son enterrement dans une tranchée de la Première Guerre mondiale. Un type sensible, poète jusqu’au bout des ongles, prosateur subtil et inventif. Il est mort en 1925 à l’âge de 35 ans. Et puis il y avait son frère, Marc (1895-1975), qui n’a certes pas démérité non plus. Il a d’ailleurs fait mieux que Louis en matière de ventes avec son Vasco (1927), mais il n’a pas atteint sa gloire de longue traîne. On lui a toujours trouvé une tournure plus franche mais moins douce. Il était taillé comme un gars destiné aux cahots du voyage, et c’est ce qu’il avait bien compris en rédigeant ses romans d’aventures ou ses essais sur les Maoris… Deux hommes, deux natures. Mais ces deux-là avaient un père, Léon, lequel avait un frère, André, et André-ci n’était pas un Chadourne comme les autres, au point que l’on se demande si ça n’est pas sous son influence que ses deux neveux se sont pris de passion pour les livres…
Né le 22 février 1859 à Saint-Cyprien, en Dordogne, André Chadourne est le fils d’un major décédé de la fièvre jaune pendant la guerre du Mexique. Il fait ses études de droit avec son frère à Paris mais trouve plus de charme à la butte montmartroise et à ses vilains petits canards qu’aux bancs d’Assas. Beaucoup moins studieux que son son frère Léon, il fréquente assidûment la bohème où s’entrecroisent Jules Renard, Paul Demel ou Jules Massennet. Il en gardera le goût des cafés et de la vie nocturne. C’est, dit-on dans la famille, l’original dans toute sa splendeur. Mais, bien entendu, après les études viennent les diplômes, et à la suite de ses derniers le chagrin… Le voici rédacteur au ministère de la Guerre, comme Félix Fénéon et quelques autres. Une rapide observation de sa bibliographie prouve qu’André Chadourne y a passé plus de temps à écrire articles et livres qu’à cogiter de futures stratégies martiales… Dès 1884, il publie une chronique sur Le Quartier latin (E. Dentu), puis une « physiologie » nouvelle mode intitulée Nos Étudiants. Deux ans plus tard, il fait jouer au Théâtre Déjazet une comédie, Le Masque vainqueur, publie un essai sur des écrivains du passé et, inévitable, une histoire des Cafés-concert qui lui vaut les louanges de Francisque Sarcey, qui avait déjà goûté ses livres sur la vie étudiante. Chadourne est lancé, enchaîne les pièces de théâtre et les chansons, écrit une comédie-bouffe (Amour de concierge !) et même un oratorio (1892) ! Ainsi de suite jusqu’à une longue pause interrompue sept ans plus tard, en 1899, par un ambitieux drame en cinq actes et sept tableaux tiré d’un roman de Dumas fils, Tristan-le-Roux. On n’en a pas entendu parler : un four ?
La vie d’André Chadourne a sans doute changé : ce dernier livre est imprimé à Brive, et ce silence de sept ans est un signe : problèmes professionnels ? maladie ? Il est difficile de l’affirmer mais s’il publie encore une anthologie de la poésie française du XIXe siècle à base de « médaillons », qui signifient portraits, en 1901, c’est assurément la fin de l’homme de lettres parisien à laquelle on assiste. En 1905, c’est le lancement du Tout-Brive qui marque la suite de son activité éditoriale. André est de retour en Dordogne ! Avec son frère Léon, ils publient des fictions, de nouvelles d’actualité locale, ces mille petites choses qui font un journal local. Le titre fonctionne bien : si André disparaît le 10 mars 1910 à l’âge de 51 ans, cinq ans après la création du titre, ce dernier survivra à son créateur jusqu’en 1938… Mais dira-t-on, et la littérature chez ce Chadourne ? C’est assurément son roman Belzébutha, publié en 1892 chez Chamuel, l’éditeur des ésotéristes et autres manipulateurs de tables. Digne produit des années post-Michelet (La Sorcière) et Hugo (Notre-Dame de Paris), opposé au naturalisme, dont les « ordures » tiennent alors le haut du panier éditorial, il déclare en préambule avoir « conçu et écrit cette œuvre, vraie et naturaliste à certains points de vue, mais profondément et foncièrement chrétienne, romanesque, idéale ».
Plongé dans une rêverie d’étudiant éreinté, il s’était pris en pleine salle d’étude à imaginer les feux follets que lui décrivait un ami du Périgord noir. « A la lueur de ces feux, qui pour tant d’autres n’eussent été rien, mon cerveau (…) prit feu instantanément. Dans ces nappes enflammées qui sillonnaient ainsi l’horreur des ténèbres, je crus voir des âmes (…) Et, sans que je fusse jamais allé à Castelnaud, je me mis à créer de toutes pièces un roman se déroulant en plein moyen âge et ayant pour héroïne la sorcière la plus affreuse qu’on pût rêver. » Et, bien entendu, « je voulus lui donner un nom conforme en tout point à son infernal caractère (…), je l’appelais naïvement Belzébutha. »

Éric Dussert

Et maintenant, l’oncle ! Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°200 , février 2019.
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