Formé aux métiers du livre, Antoine Gallardo (47 ans) a été libraire pour les autres avant de monter sa propre librairie, La Boucherie littéraire, à La Tour-d’Aigues (Vaucluse). « Parmi les différents locaux que j’avais visités, il y avait une boucherie-charcuterie. Je me suis finalement installé dans une ancienne salle de musculation, mais le nom est resté… » Au grand dam d’élus qui auraient préféré La Miellerie littéraire… Si l’expérience de la librairie tourne court, l’association La Boucherie littéraire diversifiera ses activités. Antoine Gallardo est un infatigable militant du livre. De l’énergie à revendre. Poète lui-même, fervent défenseur de la bibliodiversité, il crée en 2011 le salon Les Beaux jours de la petite édition. « Je découvrais des auteurs via les maisons que j’invitais. » Suivront cinq autres salons. En 2015, il lance Poésie nomade en Provence, festival de poésie à voix haute. « Ce type de manifestation manquait dans la deuxième région de France en nombre d’éditeurs… Je montais tous les mois à Lyon pour écouter la Scène poétique. » La même année, La Boucherie littéraire devient éditeur. Et pas à moitié. Vingt-huit titres parus en quatre ans. « Ça fait beaucoup d’enfants pour un homme célibataire », sourit-il. Filant la métaphore, le catalogue se déploie en trois collections : « Sur le billot », « La Feuille et le fusil » (avec des papiers différents « teintés dans la masse ») et « Carné poétique ». De couleur rouge sang, cette nouvelle collection est une curiosité. Un poème de vingt pages est pris en sandwich entre quarante pages vierges laissées à l’inspiration du lecteur. Viande crue ou viande cuite donc, selon les goûts.
« Je veux publier plein de choses différentes, et surtout des auteurs inconnus », dit Antoine Gallardo, qui peine à citer ses « grands » poètes (« peut-être Guillevic, Charles Cros et Hanshan »). Aux côtés de Mireille Disdero, Marlène Tissot (et son très beau Lame de fond), le jeune éditeur publie des auteurs qui se consacrent autant à la scène qu’à la page, comme Patrick Dubost, Claire Rengade, Emanuel Campo, Nicolas Vargas… Rencontre avec un autodidacte passionné, heureux de « vivre en poésie », qui prévient : « Je n’ai pas l’esprit de synthèse. Je suis complètement éparpillé. C’est peut-être pour cette raison que la poésie m’intéresse. »
Comment devient-on éditeur de poésie ?
On n’arrive pas là par hasard. J’écris de la poésie depuis enfant. Je voulais en faire un métier, au grand dam de mes parents. J’ai grandi dans une maison où le livre était absent. Au collège, je faisais mes dissertations en alexandrins. C’était mon mode d’expression. Cela a dû formater mon goût pour le texte court, le retour à la ligne… Je suis monté à Paris pour la première fois à l’âge de 25 ans. Ce fut un choc. J’ai découvert qu’il y avait des poètes vivants, qu’il existait une poésie de création.
Le premier livre de La Boucherie littéraire est né de la rencontre entre l’artiste suisse...
Éditeur La poésie sur le billot
juin 2019 | Le Matricule des Anges n°204
| par
Philippe Savary
Implantée dans le Luberon, La Boucherie littéraire est une excellente adresse pour les jeunes auteurs. Défense et illustration d’une parole poétique vivante.
Un éditeur