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Poésie Babel en France

février 2020 | Le Matricule des Anges n°210 | par Dominique Aussenac

La poésie de nos territoires réunie pour la première fois en un recueil aussi chatoyant que vespéral.

Par tous les chemins

Florilège poétique des langues de France - Alsacien, Basque, Breton, Catalan, Corse, Occitan
Editions Bord de l'eau

Alors que la langue française s’enivre d’anglicismes et que les langues dites régionales mises sous le boisseau depuis des lustres par un jacobinisme aveugle et aujourd’hui incongru en Europe sont dans un état de coma avancé, la publication de ce Florilège relève d’une sacrée gageure. Consacrer quatre cent quatre-vingts pages à l’expression poé- tique de cinq langues : alsacien, basque, breton, catalan, corse, occitan est une aventure éditoriale énorme que Marie-Jeanne Verny (universitaire montpelliéraine) et Norbert Paganelli (poète corse) ont entrepris avec méthode et pondération. Le mieux étant l’ennemi du bien, certains objecteront que les parlers gallo, picard, chti ou encore créole n’y figurent pas. Ils sont invités à prendre le relais. Le poète Jean-Pierre Siméon souligne dans la préface : « Je suis pour ma part né, si je puis dire, en langue française et je n’ai aucun lien direct avec quelque langue régionale que ce soit. Si j’ai accepté cette préface c’est donc en raison de ce que je viens de dire : toute langue non conforme à la langue dominante est une terre de liberté. »
Dans cette anthologie, un spécialiste détaille l’historique de la langue et de la poésie de chaque région. Les poètes sont présentés exhaustivement, un paragraphe évoque leur relation à l’écriture poétique et des extraits bilingues de leur œuvre sont offerts. Un quart des poètes sont nés au début du siècle passé, certains décédés. Les autres écrivent toujours, issus de toutes origines, lettrés ou autodidactes, paysans et notables, religieux et anticléricaux, nationalistes et internationalistes… L’occitan de par son territoire, la moitié de la France et l’importance, la vitalité d’une lyrique qui remonte aux troubadours occupe la place la plus importante. La dimension crépusculaire, douloureuse de la perte de la langue, l’obligation de la défendre est un thème commun à toutes les régions. L’Alsacienne Sylvie Reff l’exprime ainsi : « Où donc vont les mots lorsqu’ils disparaissent ?/ Ces mots qui portent la vie ? La langue jaillissait/ De ta bouche/ telle une cascade à jamais fraîche…  » De l’Alsace, on retiendra le rapport aux paysages, à la nature ainsi qu’un grand nombre de textes ou de biographies rappelant tel Les Camarades qui sont morts à la guerre de Nathan Katz, les enrôlés de force sous l’uniforme nazi. La poésie basque longtemps liée au chant et à l’improvisation s’ouvre sur le monde depuis les années 80. Autour de la revue Maiatz, des poètes en phase avec les émancipations politiques, sexuelles, le rock ont révolutionné la pratique poétique. Itxaro Borda évoque les migrants dans Hôtel de la gare, Hendaye : « Nous sommes cernés de saints escrocs./ Ils habillent de haine nos paroles :/ Essoufflée, je saute sur le quai dans/ Le premier train qui ne va nulle part. » Si le roman et la nouvelle occupent la première place aujourd’hui en Bretagne, la poésie s’y féminise de plus en plus. À l’instar de Marthe Vassalo : « Jamais au grand jamais, j’en fais le serment/ Nous ne regretterons le monde d’aujourd’hui.  » Comme en Catalogne où deux voix émergent, politiques, combatives : Maite Barcons et Coleta Planas dont voici quelques vers : « Vous serez les Catalans en lutte dans l’histoire/ pondant des lois nouvelles au permis d’exister ». La plupart des poètes corses de l’anthologie font partie du Riacquistu, mouvement des années 60 et 70 de réappropriation de la langue et de la culture. Né en 1973, Stefanu Cesari déclame : « Bourgeonne aussi le langage./ Toujours verte la parole, sans jamais finir,/ nous revient, nous emplit la bouche…  » La poésie occitane grâce à des maisons d’édition comme Jorn ou L’aucèl libre semble mieux résister. Une poésie en archipels, aux îles conséquentes, Bernat Manciet, Max Rouquette, Marcelle Delpastre et une relève talentueuse, Aurélia Lassaque, Sylvan Chabaud, Cécila Chapduelh, Estelle Ceccarini…
Comme le profère le Belge et artiste Julos Beaucarne, l’accent, c’est tout un pays dans une bouche. Ce florilège nous rappelle pertinemment que dans nos pays existent aussi des langues aux poésies toujours vives et fertiles.

Dominique Aussenac

Florilège poétique des langues de France
Sous la direction de Marie-Jeanne Verny et Norbert Paganelli,
Le Bord de l’eau, 480 pages, 29

Babel en France Par Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°210 , février 2020.
LMDA papier n°210
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