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Essais Poindron vaut le voyage

juin 2021 | Le Matricule des Anges n°224 | par Richard Blin

Oiseau rare qui lit pour s’aventurer et pérégrine à reculons, l’écrivain célèbre la littérature dans un opus tout en symétries et inversions.

Braconnier d’émerveillements, collectionneur de curiosités, qui ne viennent pas d’une salle des ventes mais « du hasard et de l’amitié », Éric Poindron est né en 1966, sous le signe de « l’insolite ascendant fétichiste dans une astrologie qui reste à inventer ». Éditeur le jour, écrivain la nuit – un écrivain qui rêve d’une étude sur les livres qui n’existent pas, songe à écrire un Dictionnaire des livres inclassables, parle à ses livres –, Éric Poindron est surtout un poète qui ne sait pas mais devine parfois qu’il va avoir su.
Auteur de Comme un bal de fantômes, lauréat du prix Nerval de poésie 2020, il croit comme ce dernier que l’imagination humaine n’a rien inventé qui ne soit vrai dans ce monde ou dans les autres. C’est pourquoi il se tient toujours prêt à faire un pas de côté, à se montrer irrévérencieux, à bousculer les règles pour donner vie à l’impossible. Et ce, en dévorant des livres, en les annotant, en convoquant les poètes – les géants, ceux d’ailleurs et ceux d’ici, les inventés aussi – ou encore les « costauds de l’indiscipline »  : Villon, Bierce, Cravan, Louise Brooks. En imaginant des conversations improbables entre les morts, « qui ne le sont jamais tout à fait », et les vivants, « qui ne le sont jamais assez ». Des compagnons « des confins » dans un monde qui est une immense bibliothèque et où le visible et l’invisible luttent à armes égales.
Dans Le Voyageur inachevé, ce rôdeur des frontières du sens, ce disciple d’André Hardellet, « notre frère de chemins de tangente », ce chasseur de hasards et de coïncidences, qui se croit et s’espère « enfant naturel » de Restif de La Bretonne, nous propose un voyage à l’intérieur des livres qu’il aime, de la littérature et de lui-même ou plutôt du musée « aux pièces sombres et aux miroirs ombrageux » que chaque homme porte en lui.
Un voyage en vingt-six nuits comme les vingt-six chapitres des Nuits d’octobre de Gérard de Nerval. Chaque nuit est une nouvelle pièce où déambuler de découvertes en émerveillements, d’étonnements devant les choses en vertiges ressuscités. On voyage ainsi de la salle des géographies à celle des mystères argentiques, de la salle des machines à écrire à celle des fantômes en passant par la salle Edgar Poe, la salle Lewis Carroll ou celle des confidences. C’est dans un labyrinthe d’analogies, de traces et de signes que nous entraîne Éric Poindron au fil d’une écriture fragmentaire, à densité oscillante, qui rend le temps sensible, met l’espace en mouvement, orchestre un jeu précis d’attentions, d’échos et d’affinités, nous fait croiser des « piétons des interstices », des arpenteurs de l’invisible, des « pérégrins de la grande énigme » comme Borges, Héraclite, Schwob, Mandelstam, Breton, Stevenson, Reverdy, Cortázar, Michon, Quignard, Chagall, Munch…, comparses des chemins de nuit et des voies parallèles qui permettent de sauter en marche sur une autre trajectoire du temps. Un univers où le plus lointain passé et le présent ont le même degré de réalité. Où un sablier peut se prendre pour un désert, où l’on rêve de cartes « des sables émus et des vents émouvants ». Où la réalité est « tout au plus une hypothèse ».
Fruit d’une somme de souvenirs, de lectures, de rêves faits, de marginalia, ce voyage est le lieu de rencontre des livres, des êtres et des choses que ne pouvait que croiser un homme pour qui la littérature est vivante et organique. Le livre d’un maître des opacités provisoires, d’un poète en attente d’une révélation imminente, fragile, fuyante mais qu’il ne peut s’empêcher de rechercher.

Richard Blin

Le Voyageur inachevé,
Éric Poindron
Le Castor astral, 240 pages, 16

Poindron vaut le voyage Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°224 , juin 2021.
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