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Domaine français Héros + héros = la tête à Toto

mars 2022 | Le Matricule des Anges n°231 | par Anthony Dufraisse

Dans son nouveau roman, Antoine Mouton donne à voir un monde sous cloche, aussi absurde que le nôtre ?

Toto perpendiculaire au monde

Toto perpendiculaire au monde  : un drôle de titre pour un drôle de livre. Vous le résumer ? Tentons plutôt de le mathématiser. Soit l’équation suivante à plusieurs inconnues : un couloir – baptisé le 133 – comporte de très nombreuses portes derrière lesquelles vivent toujours des couples ; exception qui confirme la règle, un certain Jean-Max, lui, est célibataire. En fait de couples, ce sont surtout des binômes qui semblent s’être constitués au hasard, sans le vouloir vraiment. Pourquoi ? Première inconnue. Tous ces duos sont affectés à une tâche bien précise et pas à une autre ; pourquoi ont-ils un travail à ce point spécifique ? C’est la deuxième inconnue. Certains de ces tandems remettent progressivement en cause le cadre qui leur sert de vie commune, et les plus radicalisés, dont Toto et celle qu’il appelle sa femme, en viennent même à vouloir sortir de ce couloir. Pourquoi ? Disons qu’il s’agit de la troisième inconnue…
La quarantaine rugissante, Antoine Mouton nous met à l’épreuve de son imagination à tiroirs. D’emblée le lecteur tente de se représenter ce monde-couloir qui est à la fois, étrangement, comme en apesanteur et sous cloche, tout en ressemblant finalement beaucoup, en version miniature, au nôtre. Ce monde-là, le voici décrit au bout d’une trentaine de pages : « Le sol, les murs et le plafond sont d’une même teinte, on ne remarque pas toujours la séparation entre le haut et le bas, ni même entre l’horizontale et la verticale. Certains se laissent désorienter au fur et à mesure de leur promenade et finissent couchés alors qu’ils pensaient partir loin. » À propos de ce couloir avec « des chambres et des couples dedans », on pourrait parler de monade, comme on dit en philosophie, un lieu (fermé) plutôt qu’un espace (par définition ouvert), une structure close et codifiée : « Le couloir se noue par endroits, se divise, ondoie, biaise et se ramifie puis se réunifie, et se disloque encore en tournant sur lui-même. Personne n’a pu en dessiner de plan exhaustif. »
Le personnage dénommé Toto, qui symbolise à lui seul un effort de conscientisation parce qu’il veut connaître la raison d’être des choses, et d’abord la raison de sa présence dans ce labyrinthique « modèle réduit d’un univers qui se défend de notre éventuelle invasion », Toto, donc, est une tête chercheuse. Où la situation se complique sérieusement – l’imagination à tiroirs dont on parlait plus tôt –, c’est qu’un récit secondaire vient s’enchâsser dans la trame première. Il y est question de gémellité et d’un nouveau personnage prénommé, lui, Otto (tiens, une anagramme de Toto…), qui travaille dans une librairie. Deux héros ou dédoublement du héros ? Ces deux histoires vont en tout cas, à un moment, s’entremêler, on ne vous dit pas comment. Tout juste vous dira-t-on que l’auteur, en habile manipulateur qui tire les fils de ses marionnettes ventriloquées, nous fait rire et réfléchir. Ce roman en forme de rébus est riche d’une sensibilité et d’une originalité tout à fait surprenantes. S’il amuse souvent le lecteur avec ses facéties à la Tex Avery, Antoine Mouton sait tout autant l’amener à s’interroger sur la notion d’enfermement, sur ce qui (dé)fait une vie, sur les règles et les lois qui nous régissent, sur les pouvoirs de la lecture, aussi. « Les intrigues du 133 » qu’il tricote revisitent à leur manière, c’est-à-dire avec une loufoquerie parfois inquiétante, un certain théâtre de l’absurde. En démontant un à un les rouages d’un microcosme observé à la loupe, il en démontre l’insensée rationalité. Et nous, par ricochet, de reconsidérer notre propre réalité un peu comme Jim Carrey dans The Truman Show. Après notamment Au nord tes parents et Le Metteur en scène polonais, cet Antoine Mouton confirme ici qu’il sait tirer les ficelles d’un univers surréel.

Anthony Dufraisse

Toto perpendiculaire au monde
Antoine Mouton
Christian Bourgois, 269 pages, 18,50
Du même auteur, La Contre Allée réédite Les Chevals morts, un hymne à l’amour qui « met la mort en exergue/ et la tristesse/ à l’agonie » (42 pages, 6,50 ).

Héros + héros = la tête à Toto Par Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°231 , mars 2022.
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