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Domaine français Pour la vérité

juin 1995 | Le Matricule des Anges n°12 | par Didier Garcia

Pages de journal et Le Témoins compromis deux livres d’Edith Thomas en quête d’une vérité identitaire et historique sur fond de résistance.

Le Témoin compromis

La presse des mois derniers (notamment les suppléments littéraires du Monde et de Libération) a rendu compte des Pages de journal et du Témoin compromis d’Edith Thomas en rappelant leur genèse ainsi qu’en présentant les principaux thèmes qui sous-tendent ces livres frères : humanisme féminin de l’auteur, sa résistance lors de la Seconde Guerre mondiale, son aventure au Parti communiste, sa mésentente avec Aragon… Ces études diachroniques, fortement influencées par la justification biographique, concluent en assurant que l’ensemble forme un témoignage bouleversant des années 30 à 50. Est-ce à dire que ces deux volumes d’Edith Thomas n’ont qu’une valeur documentaire ?
Il semble fort peu probable que l’historienne ait seulement cherché à chroniquer les années de guerre dans ses Pages de journal ; en date du 27 août 1939, n’avouait-elle pas se sentir « absolument malade à (s)’efforcer de comprendre » avant d’enchérir le lendemain : « Ce que je voudrais, c’est comprendre, être sûre de comprendre ». A l’instar du Fabrice de Stendhal sur le champ de bataille de Waterloo, Edith Thomas se trouvait soudain projetée au cœur de la tourmente, sans qu’il lui fût permis pour autant d’en saisir la complexe réalité. Le journal s’offrait alors comme l’espace privilégié pour interroger l’Histoire qui se créait, aussi bien que pour fustiger l’incurie des informateurs, les fausses rumeurs, les promesses illusoires colportées par les uns, les doutes avivés par les autres. Alors que l’Histoire héritait des peurs et des désirs de chacun, Edith Thomas ne vivait -c’est-à-dire : n’écrivait- que pour accéder à la vérité quant aux événements décisifs qui menaçaient d’infléchir durablement le cours de sa vie…
Le Témoin compromis, qui constitue une manière de Mémoires, laisse apparaître lui aussi une quête similaire, mais il s’agit moins de faire œuvre d’historienne que de comprendre son propre engagement dans l’Histoire, justifier ses choix et ses décisions -à ses yeux ainsi qu’à ceux d’un destinataire apocryphe.
« Mes livres n’auront jamais été que la recherche plus ou moins malhabile d’une mise au point » : que ce fût dans les Pages de journal ou dans Le Témoin compromis, Edith Thomas n’a jamais faibli devant sa volonté d’évacuer la subjectivité inhérente aux genres littéraires qu’elle avait choisis pour s’exprimer. Le Journal intime de Monsiur Célestin Costedet, fiction rédigée par l’historienne à seule fin de railler ls bourgeois pétainistes, représente d’ailleurs l’exacte antithèse de son idéal en matière de journal : Célestin Costedet cède volontiers à la tentation du lyrisme, au larmoiement, ainsi qu’à une complaisance inutile. Parlant de ses adultères dans les dernières pages de sa confession, il prend enfin conscience « que cela ne représente pas d’intérêt pour l’histoire »
Edith Thomas s’était convaincue de l’inanité des récits intimes : seule importait la vérité individuelle, à laquelle nul ne saurait prétendre sans la nécessaire éviction des subjectivités qui altèrent l’Histoire. Pourtant, en dépit d’une écriture presque trop précautionneuse, elle en vient parfois à douter : « Il est très possible que ces pages n’aient d’intérêt que pour moi ». Qu’était-il de plus éloquent qu’une publication pour infirmer définitivement cette ultime incertitude ?

Pages de journal
et Le Témoin compromis
Edith Thomas
Viviane Hamy
332 et 134 pages, 159 et 129 FF

Pour la vérité Par Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°12 , juin 1995.