Dorme il suo viaggio, lui, entra/ fasciato dal suo sonno/ nello spazio che lo ingoia/ e nel tempo che lo attende/ Entra nel suo futuo/ lui, dormiente. » (« Il dort, lui, son voyage, entre / langé par son sommeil/ dans l’espace qui l’engloutit,/ dans le temps qui l’attend./ Il entre dans son futur, lui, dormant. »)
Dans le Petit Palais d’Avignon, la voix grave et profonde du poète italien Mario Luzi s’élève, déclamant avec douceur et suavité le poème Simone, extrait de son nouveau recueil : Voyage terrestre et céleste de Simone Martini.
Les différents genres littéraires abordés par Mario Luzi (théâtre, poésie, récit, portraits) se retrouvent dans ce long poème opératique. Dans ce musée consacré à la peinture italienne du Moyen Age et de la Renaissance, la lecture de Mario Luzi, relayée en français par son traducteur Bernard Simeone, prend encore plus d’ampleur. Vêtu d’un costume sombre, Mario Luzi fait preuve d’une soudaine assurance lorsqu’il prononce ses textes. Son visage s’illumine et, sourire aux lèvres, le poète fixe avec intensité des regards dans la salle.
Le peintre italien Simone Martini fut présent à Avignon puisqu’il réalisa de nombreuses œuvres dans cette ville où il dut mourir. En imaginant son retour jusqu’à Sienne, sa ville d’origine, où le peintre retourne pour voir la Maestà (représentation de la Vierge parmi des anges et des personnalités religieuses) qu’il a peinte en 1315, Mario Luzi reprend les couleurs de la Renaissance pour réaliser une méditation sur les interrogations propres à la création artistique. Cette réflexion trouve dans le Petit Palais un véritable support : une exposition sur la Maestà récemment restaurée et un parcours poétique parmi les collections du musée permettent de saisir les liens secrets entre cet art dévoué à la divinité et la poésie de Mario Luzi.
Après une enfance dans la région de Sienne, Mario Luzi a vécu à Florence. C’est le début de nombreuses rencontres et amitiés, notamment avec les écrivains Montale, Bilenchi, Bigongiari et Betocchi. Il publie son premier recueil, La Barque, en 1935. Il se marie en 1942 et s’installe définitivement à Florence en 1945. Il poursuit une œuvre dont la maturité lui assure très tôt la reconnaissance de ses contemporains. Après une carrière d’enseignant, il sera de 1955 à 1985 professeur de littérature française à l’institut des sciences politiques de Florence. Parti du mouvement « hermétique » des années 40 qui, en plein fascisme, propose une poésie privilégiant la multiplicité des sens, Mario Luzi choisit dans les années 60 une écriture plus politique, sans pour autant rejoindre la pensée de Pasolini ou de Fortini sur la crise du néo-réalisme. Voyage terrestre et céleste de Simone Martini confirme un redéploiement de l’écriture lyrique, entamé depuis quelques années.
Mario Luzi, également traducteur de Baudelaire et Mallarmé, s’exprime dans un français simple, parfois précisé par son traducteur. Rencontre avec l’un des poètes...
Entretiens L’or et l’azur du poète Mario Luzi
A plus de 80 ans, Mario Luzi offre avec Voyage terrestre et céleste de Simone Martini un vaste poème polyphonique sur la nature artistique et l’être humain inspiré par un des grands peintres siennois de la Rennaissanve.