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Domaine français la ferveur de l’abandon

septembre 1996 | Le Matricule des Anges n°17 | par Thierry Guichard

En six textes lumineux et sombres, Claude Louis-Combet éclaire la part la plus obscure de l’être humain. Entre extase et monstruosité.

Écrite à l’origine pour Les Cahiers Gilles de Rais, la nouvelle qui donne son nom au recueil s’ouvre sur le sentiment de plénitude et de profond accord avec la nature que donne la foi. Un enfant se rend à sa première communion, près de Machecoul. « En cette affaire (…) qu’un démon avait peut-être inscrite, avant tout commencement, dans la figure des constellations, la pensée de la communion était essentielle. » Extatique, l’enfant rencontre en forêt l’ancien compagnon de Jeanne d’Arc avec ses soldats et se laisse emmener par la troupe : « C’était un moment splendide et l’enfant qui n’avait d’autre souci que de sentir l’entier présent du monde dans la légèreté et dans la gravité de son âme retenait tout son bonheur dans le trot qui l’emportait. » Un trot qui le conduit à une communion, certes, mais celle d’une religion noire, cruelle et violente. Dans un rituel presque muet le jeune garçon est violé par la communauté, sans rien dire sinon hurler de douleur, mais d’une douleur qu’il accepte comme un don. Les dernières pages, insoutenables si l’écriture de Louis-Combet ne leur offrait pas leur poésie ne cachent rien de la torture, de la mutilation que le jeune être subit jusqu’à la mort. Au regard d’une actualité sordide qui ramène de Belgique des images macabres, ce texte en offusquera plus d’un. D’autant que, durant cette initiation mystique, la victime montre, sinon un consentement, du moins un abandon proche de la jouissance. D’une foi tournée toute entière vers un dieu d’amour à cette extase autodestructrice, le fossé n’est pas si grand qu’un enfant ne puisse le franchir.
La deuxième nouvelle, Les Milésiennes, est construite autour du même thème : après la pendaison du bandit Polycrate et de sa bande, les jeunes filles peuvent enfin sortir librement dans la ville de Milet réputée pour ses philosophes. Et profiter de ses jardins : « Ces jardins que des grottes aussi approfondissaient et que des ruisseaux animaient de leur cours (…) permettaient à ceux qui avaient le loisir de s’abandonner à la promenade d’oublier bientôt tous les soucis du jour et, dans une opération d’abstraction intérieure, de se délier de l’espace citadin et du temps des projets ordinaires. » L’abandon ici encore ressemble à la foi. Et les adolescentes vont, une à une, aller se pendre. Pourquoi ? Les philosophes plancheront sur le sujet, on tentera d’enfermer les jeunes filles ; elles se démèneront pour se sauver et rejoindre la mort. Impossible de dévoiler l’hypothèse finale de ce très beau texte empreint d’une délicate sensualité.
Enfin, recommandons Ouroboros junior qui clôt le recueil et qui à lui seul vaut qu’on achète et lise ce livre. Ouroboros est le fils monstrueux de la mère Boros qui le conçut à cinquante ans et du géant Ursus. Elle trimballe de foires en foires sa compagnie de « phénomènes » comme « la femme sans tête qu’elle nourrissait par des tubes métalliques (…), la femme-crocodile (…) et les siamoises, soudées aux épaules, dont l’une était obèse et l’autre squelettique. ». Le jeune enfant lui est « curieusement conformé » puisque seuls sa tête et son sexe semblent croître avec les années. Hypertrophiée, la verge atteindra un telle taille que l’enfant pourra sans effort la mettre en bouche et la sucer comme d’autres leur pouce. « L’enfant-biberon », à la foire, aura un gros succès auprès de la gent féminine. L’enfant grandira, privé de parole et totalement idiot. « Et dans la dilution d’un temps que n’occupait rien d’autre que l’attente et la rêverie des femmes et les désirs confus qui s’agitaient en elles, le jour éclata enfin où le soleil se leva au-dessus du corps du petit Urs. » C’est que le jeune monstre est arrivé à l’âge d’homme. La mère, alors, pourra en faire pleinement, sa chose.

Thierry Guichard

Du même auteur Dado, le sacre du dépotoir sur l’artiste Dado, fouilleur de décharges publiques et créateur des marginalia « qui préfigurent les horreurs à venir, les monstres à naître »
Éditions La Pierre d’Alun, 81, rue de
l’Hôtel des Monnaies B-1060 Bruxelles

Rapt et Ravissement
Claude Louis-Combet

Deyrolle Éditeur
82 pages, 89 FF

la ferveur de l’abandon Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°17 , septembre 1996.
LMDA PDF n°17
4,00