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Domaine français Le chaos des souvenirs

mars 1997 | Le Matricule des Anges n°19

Après Sur le motif, Hubert Lucot revient, avec Absolument, aux paysages délabrés qui hantent sa mémoire. Une résurrection déroutante.

Absolument (1961-1965)

L’œuvre en cours d’Hubert Lucot (né en 1935) semble pouvoir être divisée en deux périodes : celle des livres brefs antérieurs à 1980 (parmi lesquels figure jac Regrouper) et celle des livres plus volumineux, qui coïncide avec son entrée aux éditions P.O.L (Autobiogre d’A. M. 75, Phanées les Nuées, Langst, Sur le motif), avec Le Grand Graphe comme ligne de partage, ce livre d’une seule page de 12m2 publié chez Tristram. Une œuvre qui se fraie son chemin dans une prose d’une densité extrême -ce n’est pas pour rien que Christian Prigent le range parmi ceux qui font « merdRer » la langue.
Absolument appartient à la première période Lucot : il s’agit d’un livre bref, à l’écriture particulièrement serrée, daté « 1961-1965 ». La quatrième de couverture, qui délivre des indications capitales, encourage le lecteur à s’aventurer du côté des procédés de composition : « laissant aux mots leur charge statique, je refusais narration (le genre romanesque était mort) et description (le nouveau roman tendait déjà à la rédaction scolaire) ».
Qu’est-ce donc qu’un livre qui prétend pouvoir faire l’économie de la narration et de la description, tout en affichant sa volonté de reconstituer le paysage français englué dans la Seconde Guerre mondiale ainsi que le Paris des années 60 ? Une provocation ? Une gageure ? Rien de tout cela, mais une entreprise des plus sérieuses qui tente de restituer la matière confuse du souvenir, qui essaie d’adapter la phrase à la dimension chaotique du passé.
Hubert Lucot procède donc par notes, par phrases abandonnées en chemin (de ces phrases qu’il faut quitter parce qu’elles réveillent d’autres souvenirs, suscitent d’autres images, entraînent vers d’autres pistes), par parenthèses qui rappellent qu’il reste toujours un détail à introduire. Un texte ouvert aux sursauts de la mémoire, résolument fragmentaire, qui reconstitue de manière presque concrète, presque visible, l’univers kaléidoscopique du souvenir, à jamais lacunaire et parcellaire. Mais dans ce chaos manifeste (la langue finit toujours par capituler devant l’opacité du réel), « quelque chose prend forme », confusément : la « Ville Moderne » qu’est Paris, dans son entrelacs de boulevards et d’édifices, quelques traces (« ornières répétées d’un camion mènent à la maison »), une gare (« Petite maison de campagne. Ouverte à tous et accès. Personne. Traversée -des affiches jaunes- la vallée, Montbarbin. Rouge, klaxon, la Micheline. »).
Absolument est un livre difficile ; on pourrait même le dire technique pour mieux rendre compte des stratégies mises en œuvre ; à moins qu’il ne s’agisse encore plus simplement d’un livre expérimental, un manifeste de la subversion, comme semble le corroborer cette comparaison : « une malle d’osier comme, » dans laquelle s’affirment à la fois le refus de céder à l’arme maîtresse de la description (comparaison ou métaphore) et la volonté d’effacer l’auteur, de le laisser le plus en retrait possible de son texte.
Mais Absolument demeure surtout un texte fondamentalement authentique qui reconnaît, sans le déplorer, l’impossibilité de trouver une langue qui puisse rendre compte du délabrement de certains souvenirs. Un livre qui ne ment pas, donc de la vraie littérature.

Absolument
Hubert Lucot

La Sétérée (26 400 Crest)
66 pages, 105 FF

Le chaos des souvenirs
Le Matricule des Anges n°19 , mars 1997.
LMDA PDF n°19
4,00