La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Domaine français À l’article de la folie

juillet 1997 | Le Matricule des Anges n°20 | par Maïa Bouteillet

Le nouveau roman d’Harry Mathews montre comment la tenue d’un journal confine au délire monomaniaque et parano. Absurdement oulipien.

Le Journaliste

Sur les bons conseils de sa femme et de son psy, le narrateur décide de tenir son journal pour se remettre d’une dépression. Manière de tirer au clair le quotidien. je peux m’occuper de ma merde, je peux aussi m’occuper de la merde du monde (…) Voilà ce que j’attends d’une prise de notes efficace : plus de temps pour voir, plus de temps pour les autres. Et c’est tout le contraire qui se produit. Au fil des pages, le journaliste, celui qui tient son journal donc, se réfugiera toujours davantage dans ses notes pour se cogner finalement à un dangereux dilemme : « l’écriture ou la vie ». Supposée moyen thérapeutique, l’écriture devient ici instrument de la folie. L’adage stendhalien Vingt Lignes par jour, qui servait de titre et de principe au précédent roman de Harry Mathews, est poussé à son comble. En digne et grand représentant de l’Oulipo, l’auteur américain, qui fut un ami proche de Georges Perec (traducteur de la plupart de ses écrits), jongle avec la logique et atteint des sommets sur la voie de l’absurde. Les plus friands se délecteront tout particulièrement avec la scène de l’omelette et/ou celle du changement de roues.
D’une méticuleuse précision et d’une affolante maniaquerie, l’exercice alterne les confessions avec le détail des repas quotidiens (pantagruéliques le plus souvent), les récits de rêve et les voeux pieux avec l’examen de tenues vestimentaires. Toujours scrupuleuses, ces descriptions sont particulièrement soignées dès lors qu’elles concernent son supérieur hiérarchique. « M. Valde portait un pantalon de gabardine résolument sinistre (d’une couleur située quelque part entre le noir mâchefer et le grand nulle part), une veste de sport pied-de-poule gris bleu de (mettons) linoléum usé, l’inévitable chemise blanche, à demi masquée par une large cravate marron apparemment décorée d’ongles désaffectés… » Chef de service dans une grande entreprise de production d’objets, il se livrera avec la joyeuse énergie d’un gosse à une petite crise de subversion dont il nous faut conserver ici toute la primeur au lecteur.Mais le narrateur se perd surtout en conjectures sur son entourage privé : sa femme Daisy et leur fils Gert, sa maîtresse Colette, épouse de Jago, compagnon de plus en plus proche de son meilleur ami, Paul. Pourquoi Gert voit-il Daisy en cachette ? À qui sont destinés les mystérieux coups de téléphone de Daisy et qu’allait-elle faire à l’hôpital ? C’est là qu’il laisse libre cours aux hypothèses les plus folles. Mais les pages les plus délirantes concernent évidemment l’élaboration du journal lui-même. L’homme se promet sans cesse d’ d’où le système des « intraits », principe de subdivisions à l’infini, tellement élaboré qu’il condamne le narrateur à l’insomnie et le lecteur à un mal de crâne tenace. note-il peu de temps avant de se réveiller dans un lit d’hôpital. Aussi fantaisiste soit-elle, l’histoire n’est pas dénuée de réflexion, notamment sur l’information. Cette folle pêche à la ligne, cette entreprise démesurée pour capturer le réel renvoie forcémment au travail de journaliste. D’où le titre.


Maïa Bouteillet


Le Journaliste
Harry Mathews
P.O.L., 293 pages, 130 FF

À l’article de la folie Par Maïa Bouteillet
Le Matricule des Anges n°20 , juillet 1997.
LMDA PDF n°20
4,00