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Poésie Le vol suspendu du temps

janvier 1999 | Le Matricule des Anges n°25 | par Thierry Guichard

En français et en chinois, les poèmes de François Cheng figent un instant de la vie de l’univers et en restitue le double chant terrestre et céleste.

Dans son écriture comme dans sa réalisation, le double recueil de poèmes de François Cheng laisse transparaître le désir de ralentir le temps, à défaut de l’arrêter. Dans leur tessiture et dans la magnificence de leur reliure à la chinoise, chacun des deux recueils rassemblés en coffret sous le titre Double Chant invite le lecteur à prendre le temps, à découvrir d’abord le chemin de l’écriture avec les doigts puis les yeux, dans une lecture sensuelle et d’abord muette.
François Cheng a calligraphié lui-même son texte en chinois et en français. Son écriture, légèrement italique couvre ainsi les deux-tiers de chaque recueil, Un jour, les pierres et L’Arbre en nous a parlé. Les caractères d’impression s’emparent du tiers restant. On a donc sous les yeux trois fois le même texte : manuscrit en chinois, calligraphié en français et imprimé. Dans la répétition cependant, l’empreinte, la trace ne sont pas les mêmes et l’on perçoit chaque partie assez différemment. Laissons de côté les idéogrammes dont le mystère et la beauté doivent beaucoup à leur étrangeté. La lecture du texte français calligraphié met en évidence la très grande proximité de la voix qui s’y fait jour. François Cheng est là, tout près, contre notre oreille, et sa poésie contemplative et méditative nous touche par sa simplicité. Imprimé, le même texte acquiert plus de gravité, peut-être parce qu’il devient, dès lors irrémédiable. Un jour, les pierres offre un exemple de cette dualité. François Cheng y développe une méditation autour de la pierre, du galet orphelin de la mer, au météore « Ayant survécu/ A la déflagration première/ A la chute// sans fin… » Son chant fouille la part cosmogonique du rocher. Le recueil se termine par l’évocation des tombes, des « Stèles érigées par les humains/ Au bord des champs/ Au cœur des ruines// Témoins de vaines gloires » et qui seront encore là « Jusqu’à la fin/ Jusqu’au moment où nul/ Ne sera là/ Pour déchiffrer/ Les signes gravés ». La poésie de François Cheng suit le chemin de ce regard qui sélectionne, qui élit un simple caillou et le nomme jusqu’à toucher, au cœur du poème, ce qui élève la pierre au-dessus de celui qui la contemple. L’humilité est au bout de ce regard dont l’infini est l’horizon.
Pourtant, le travail du poète, consiste bien à faire que s’élève un chant. Que s’unissent à travers lui « Les arbres de l’infinie douleur » et « Les nuages de l’infinie joie ». Que l’aile d’un papillon, alors qu’arrive la pluie soit l’ « unique jet de lumière ». Réceptacle du spectacle de la nature, il est aussi celui qui en restitue le sens.
Aux échos graves de Un jour, les pierres on aime assez que réponde, à la fin de L’Arbre en nous a parlé, l’évocation du printemps. François Cheng n’oublie pas que l’un porte l’autre en lui, que le printemps porte en lui la trace de l’hiver comme la vie nourrit la mort : « Le sous-bois s’éveille/ Les couleurs se souviennent/ Ce qui reste de neige/ est une douleur oubliée ». Et l’on s’interroge sur ce qui, dans cette poésie, se souvient d’une langue qui est le chinois et d’une autre qui est le français. Saisie entre ces deux langues, et saisie entre le rocher terrestre et l’arbre céleste, l’écriture de François Cheng semble comme suspendue. Il arrive donc que l’on retienne son souffle à la lire.

Double Chant
François Cheng

Encre Marine
non paginé, 250 FF

Le vol suspendu du temps Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°25 , janvier 1999.
LMDA PDF n°25
4,00