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Domaine français Pénétration du réel

septembre 2000 | Le Matricule des Anges n°32 | par Thierry Guichard

Bonne nouvelle : Bret Easton Ellis et David Lynch ont un frangin français ; Jean-Hubert Gailliot. Les Contrebandiers ou l’art de penser vite et bien….

Voici un des romans les plus rapides de cette rentrée littéraire. On y entre vaseux par le biais d’un narrateur mal en point, perdu dans un paysage mangé par une neige subite. Le genre de héros qui fait le bonheur de David Lynch : toujours en train de sortir d’un cauchemar. De la pâte gluante des lendemains de cuite on passe vite à l’électrochoc : notre bonhomme se retrouve dans une ambulance en compagnie du visage mutilé d’une amie… le reste du corps est absent. Choqué (n’est-il pas aussi victime de l’accident ?) il est pris en mains par le docteur Sanger -transfuge de La Face cachée du soleil, roman de J. G. Ballard- qui, psychiatre, se réjouit de fouiller l’inconscient de son patient.
Notre accidenté perçoit de temps en temps des images de Thomas qu’il situe du côté de Séville. Thomas ou Tom, c’est, bien entendu, le Tom de La Vie magnétique le premier roman de Jean-Hubert Gailliot. Tom prend le relais de la narration. Il a franchi les Pyrénées en douce et boit quelques verres de manzanilla, assis dans le fauteuil de coiffeur d’un bar espagnol lorsqu’il fait la connaissance de deux autres Français, Vince (pour Vincent) et Candy (pour Claudine) anciens Bonnie and Clyde qui ont purgé leurs 20 ans de détention pour le meurtre de cinq personnes. Leur histoire et eux-mêmes ont été achetés par une fort jolie productrice de cinéma, Libertad Montoya (oui son nom sort aussi d’une fiction) qui va engager Tom pour mener à bien son projet. Une patiente du docteur Sanger sera également embauchée : Flashy Love qui nous servira d’avant-dernière narratrice du roman.
Si vous n’avez pas le tournis, ajoutons, qu’on croisera aussi un énigmatique Gilles Bernstein dont le corps a été repêché trois fois dans la Seine -dix cadavres du même homme attendent au fond de l’eau- ce qui pose quelques problèmes à la police.
Jean-Hubert Gailliot excelle à nous faire tomber de surprises en surprises, alimentant son récit de phrases rythmées comme des morceaux d’anthologie de la littérature américaine.
Mais son roman n’est pas juste une partition de virtuose. Reprenant à son compte la thèse développée par J.G. Ballard dans La Face cachée du soleil selon laquelle la société de consommation a besoin du crime pour se vivifier, il la pousse dans une voie fort séduisante. Le réel et la fiction sont en guerre depuis que la société existe, les créations des artistes, mises en place pour répondre à la réalité, ont vite été absorbées par le réel, qui en a fait des objets de divertissement inoffensifs. Figure emblématique de cet état de fait : Michaël Jackson qui avant d’être humain était connu des enfants pour être un personnage de dessins animés (ses apparitions dans Les Contrebandiers sont une merveille). Bref, pour les personnages du roman, il s’agira non plus de commettre une fiction, mais d’agir sur la réalité et d’y apporter l’élément criminel indispensable.
« Franchir des frontières est mon métier » est la première phrase de La Face cachée du soleil : elle pourrait être la devise de nos héros. Frontière réelle, marquée par le massif pyrénéen ; frontière entre deux livres (les personnages viennent quasiment tous d’un autre roman) ; frontière entre l’adolescence et l’âge adulte ; frontière, enfin, entre la réalité et la fiction : il ne s’agit pas seulement de les passer en contrebandiers (c’est-à-dire en liberté) : il s’agit aussi de les repousser… jusqu’au vertige.

Les Contrebandiers
Jean-Hubert Gailliot

L’Olivier
189 pages, 110 FF

Pénétration du réel Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°32 , septembre 2000.
LMDA PDF n°32
4,00