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Arts et lettres Le bâtisseur de gloire

août 2001 | Le Matricule des Anges n°35 | par Thierry Guichard

Les Passants immobiles

Illustration(s) de Janot G./Moreau R./Poitevin É.
Editions Joca Seria

Le livre institutionnel deviendrait-il un genre à part entière ? La question peut être posée aujourd’hui où l’on voit fleurir de plus en plus de ces ouvrages issus d’une commande passée par une institution à un écrivain. Ce sont ici quatre artistes en résidence en Vendée que publie Joca Seria, associé pour l’occasion, au Frac des Pays de Loire. Parmi eux, un écrivain et non des moindres : Pierre Michon. Citons à ses côtés, Guillaume Janot, Robert Moreau et Éric Poitevin qui ont donné au livre leurs photos, celles-ci n’étant pas forcément destinées à ce genre de publication. Arrêtons-nous alors sur le texte de Pierre Michon, superbe triptyque attaché aux terres humides du pays.
Comme il l’avait fait dans Mythologies d’hiver (Verdier), autre livre né d’une commande, Pierre Michon remonte loin dans le temps pour fonder une légende attachée au paysage qu’on lui offre. C’est en 976 alors que « la vieille Gaule est un fatras de noms enclavés à des terres, qui sont elles-mêmes des noms » qu’il fait commencer sa chronique et dresse sur la platitude des marais la silhouette de l’abbé Eble dont le feu brûle différemment de celui de son frère, Guillaume le guerrier. Eble décide de « démêler » la terre et l’eau et de faire des marais une terre accueillante. Pour dire cela, Michon convoque les psaumes et de belles voix, met de la lumière et fait chanter les noms. Il fait entrer dans le livre et dans le lit d’Eble « la verticale sans frein de l’éclair », c’est-à-dire une femme qui est belle et dont « les pieds nus sont de marbre ». Les éléments de la mythologie sont en place et le lecteur ne visitera plus ces terres de ciel et d’herbe de la même façon.
Plus loin, on pense à La Grande Beune (Verdier, 1996), le roman inachevé de Michon, avec une chasse au sanglier qui ressemble aussi à une chasse au saint Graal, à la femme ou à Dieu. La gloire est affaire de courage mais aussi de style : il faut qu’un scribe la retranscrive et ce n’est pas un hasard si l’auteur de la chronique telle que Michon prétend l’avoir lue s’appelle Pierre aussi. Les noms ont une importance religieuse et des os, pour peu qu’on puisse « les revêtir d’un texte, le Texte écrit il y a mille ans ou les textes écrits il y a cent ans » deviennent vite de précieuses reliques. Ainsi des restes d’un homme qu’on disait être le Baptiste. Ce sont bien les mots qui fondent les choses et non l’inverse, les mots qui font d’une pierre un objet sacré, d’un paysage une histoire, de quelques silhouettes sous un ciel profond l’humanité tout entière. Les mots qui font de la chevelure blonde d’une petite fille « à tête d’étoupe«  »le flambeau du jour. (…) Cela ressemble à autre chose, qu’Eble connaît bien (…). L’abbé cherche très vite, et ce qui lui vient à l’esprit, c’est le mot gloire. »
Quand ils sont écrits par Michon, les livres de commande sont comme les vitraux des églises : ce n’est pas ce qu’ils chantent qu’on admire, mais la manière dont ils le chantent.

Les Passants immobiles
Pierre Michon, Guillaume Janot
Robert Moreau, Éric Poitevin
Éditions Joca Seria
143 pages, 120 FF (18,29 o)

Le bâtisseur de gloire Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°35 , août 2001.
LMDA PDF n°35
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