La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Histoire littéraire Magique Schwob

janvier 2003 | Le Matricule des Anges n°42 | par Benoît Broyart

Figure du symbolisme, cet esthète érudit était un conteur formidable et original, attiré par le bizarre et le merveilleux. Ses chef-d’œuvres enfin réunis, modèles de la forme courte.

Marcel Schwob (1867-1905) fut un esprit cultivé et curieux, un homme inscrit dans son temps, inclassable, pris entre deux siècles, avec cette sensibilité propre à son époque qui allie subtilité et goût pour le fantastique, délicatesse et attirance pour la bizarrerie. Auteur, journaliste, préfacier de Stevenson et de Rachilde, traducteur de Shakespeare et de Defoe, Schwob fut un acteur majeur de la vie littéraire de l’entre-deux siècles. Ami de Claudel et de Léon Daudet, il fréquenta Renard, Gide ou Wilde. Cet homme de grande culture, fasciné par l’œuvre de François Villon, est mort à 37 ans, des suites d’une longue et terrible maladie, calmée à la morphine. Difficile de considérer que ce grand blessé aura trouvé le temps de polir autant de textes. Le volume ici publié en contient en effet plus de 150.
L’ouvrage rassemble l’essentiel de l’œuvre. Sylvain Goudemare, auteur d’une biographie remarquée Marcel Schwob ou les Vies imaginaires (Le Cherche Midi, 2000) en a établi l’édition. Les textes sont livrés dans leur ordre de parution et le volume comprend deux sections. La première, consacrée aux œuvres de fiction, contient Cœur double, Le Roi au masque d’or, Mimes, Le Livre de Monelle, La Croisade des enfants, Vies imaginaires, L’Étoile de bois et les contes parus dans l’Écho de Paris. La seconde regroupe les études et essais : Spicilège et Variations sur l’argot principalement. À cela s’ajoutent des introductions éclairantes et quelques notes.
Ce qui frappe, c’est la diversité des tons et des formes courtes employés par l’écrivain pour contenter son appétit de narration. En effet, si l’on considère Cœur double par exemple, premier recueil publié, on reste admiratif devant un tel talent de caméléon. Marcel Schwob est-il grave ou léger ? L’écrivain est-il un fabuliste ou un affabulateur ? À l’instar de Borges, on ne sait jamais si l’écrivain fait preuve d’une érudition étonnante ou s’il bluffe son lecteur, l’emportant dans une sphère ou l’histoire rejoint le désir d’histoires, où tout est mêlé, brisé, recyclé.
Schwob expérimente, multiplie les voix, s’attachant à créer aussi des formes inédites. Mimes est à ce titre un recueil captivant. L’écrivain, avec une modernité qui conserve tout son sens aujourd’hui, donne la parole à une succession de personnages qui monologuent. Le texte court rejoint ici le poème en prose, tant la langue est à la fois dépouillée et sophistiquée : « Cette lampe à mèche neuve brûle de l’huile fine et claire en face de l’étoile du soir. Le seuil est jonché par les roses que les enfants n’ont pas emportées. Les danseuses balancent les dernières torches qui étendent vers l’ombre leurs doigts de feu. »
Le Livre de Monelle, composé avant et après la disparition brutale de la maîtresse de Schwob, porte en filigrane le deuil de l’écrivain. La figure mythique de Monelle y donne un sens à la création qu’on pourrait facilement appliquer à toute l’œuvre de Schwob : « Et pour imaginer un nouvel art, il faut briser l’art ancien. Et ainsi l’art nouveau semble une sorte d’iconoclastie./ Car toute construction est faite de débris, et rien n’est nouveau en ce monde que les formes./ Mais il faut détruire les formes. »
Disposer de l’essentiel de l’œuvre de Schwob en un volume permet de prendre le pouls d’un écrivain de toutes les narrations. C’est pourquoi on se dit que forcément, il parlera à tout le monde, que chacun pourra y trouver son compte. Malheureusement, c’est pour les mêmes raisons que l’écrivain continuera sans doute d’habiter la marge, parce qu’il se révèle insaisissable, d’une certaine façon. Impossible de trouver un tiroir où ranger un esprit si ouvert. L’œuvre est fantastique, historique, philosophique, humoristique même : « Je fus d’autant plus étonné de lui trouver une tête de mort que je l’avais positivement reconnu à sa façon de cligner de l’œil gauche. » (Cœur double).
Sa force réside incontestablement dans une incroyable capacité à être tout cela à la fois, ou plutôt, dans cette capacité à être tout cela successivement, avec un goût prononcé pour les changements de climats.

Œuvres
Marcel Schwob
Phébus (Libretto)
992 pages, 15

* Signalons la parution d’un essai collectif, publié sous la direction de Christian Berg et Yves Vadé, Marcel Schwob, d’hier et d’aujourd’hui (Champ Vallon, 352 pages, 23 ). Le recueil propose à la fois des articles critiques et des textes de contemporains de Schwob (Léautaud, Jammes, Renard, Apollinaire, etc.)

Magique Schwob Par Benoît Broyart
Le Matricule des Anges n°42 , janvier 2003.
LMDA PDF n°42
4,00